Plus de développeurs en France?
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, 25/02/2019 à 16h27 (969 Affichages)
Le pays des programmeurs de la première heure et des développeurs de tous poils, n’a paradoxalement jamais pris au sérieux l’outil numérique. L’Etat comme les entreprises françaises cumulent un retard (jusqu’à 20 ans dans certains secteurs) en matière d’équipement, d’utilisation et de développement d’outils numériques, de la gestion de données à l’automatisation de processus ou de contrôle de machines. Résultat, l’informaticien français s’exporte et l’Etat français envisage de sous-traiter la gestion des données administratives et institutionnelles (possiblement à l’étranger) : http://www.maire-info.com/numerique/...-article-22087
Alors même qu’en 2016 nos politiques soutenaient le développement d’un O/S souverain (potentiellement basé sur Linux), pré-requis pour aller vers une indépendance numérique… Des experts bien intentionnés ont moqué et décrédibilisé le projet très vite : http://www.lepoint.fr/invites-du-poi...12447_2308.php
Et pourtant l’indépendance numérique est aussi stratégique que notre indépendance énergétique. Malgré un niveau d’investissement faible à consentir (comparé à nos programmes Ariane espace, AirBus, ou le ruineux projet EPR). Le projet est donc jugé impossible par les idiots utiles des gAfAM (g+, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft), qui ont d’ailleurs fait capoté récemment (Juin 2018) la nouvelle proposition de loi européenne sur la protection des droits d’auteurs grâce à d’autres idiots utiles qui veulent voir disparaitre la notion même de propriété intellectuelle. Mais dans l’intérêt de qui ?
https://www.lemonde.fr/pixels/articl...5_4408996.html
Comme l’explique très bien Bernard Stiegler dans cette interview : https://youtu.be/YDT5f5sQSGA?t=10m31s ; c’est l’Europe entière qui a sous investi le secteur des technologies de l’information et qui sous influence, devient un conglomérat de nations désunies, consommatrices des technologies et biens culturels américains. Or si les gAfAM ont pu se développer, c’est grâce à des investissements colossaux, y compris des investissements d’états (directs ou indirects), dont on ne mesure pas l’importance ici, tant l’on nous fait croire que l’économie de marché et l’entreprise libérale conquièrent le monde par leurs seules vertus… Comme si Amazon, Google ou même Microsoft auraient pu émerger sans l’aide massive de la puissance publique américaine. C’est ce que Bernard Stiegler appelle « la crétinisation de l’Europe par le lobbying Américain ».
La France contracte un handicap supplémentaire, élitisme académique oblige : son mépris pour l’expérience et les savoirs faire techniques et manuels. Pour l’université comme pour beaucoup d’entreprises françaises, il n’y a pas d’intérêt dans la recherche appliquée, celle qui émane du terrain industriel, qui se construit par décennies de pratiques et par accumulation d’expériences d’ingénierie. Or cette recherche appliquée, qui demande aussi de conserver un personnel expérimenté et un tissu industriel important, est une force d’innovation inestimable (que la Chine utilise pour se développer à grands pas). Comment donc faire de la l’I.A. ou des algorithmes « BigData » sans avoir les bases de données ? Comment aborder la décennie de la robotique sans être capable de construire la moindre pièce du robot ?
Si le développeur se fait rare en France,
https://www.lesechos.fr/idees-debats...ls-2168321.php
c’est d’abord une question de moyen, une rémunération trop faible et des conditions de travail qui se dégradent (comme c’est le cas pour beaucoup d’autres professions en pénurie de personnel, hospitalier, hôtelier, enseignement… et les efforts de formation ne servent à rien en matière d’emplois mal payés). Mais c’est aussi parce que la demande en développement reste à la fois incroyablement faible au pays de la Startup : http://www.liberation.fr/futurs/2017...nation_1580285 et à la fois complètement démesurée. Le retard des entreprises françaises est tel que la plupart des départements R&D sont dégradés en unités de production, sommées de développer au pas de charge la même chose que les concurrents, sans admettre que cette concurrence a investi des budgets importants en R&D pendant des années, voire des décennies. Cela contribue encore à dévaloriser le métier des développeurs, traités comme de simples tacherons, dirigés par des cadres incompétents qui ne comprennent pas la difficulté de programmer des logiciels ou algorithmes qui existent déjà et qui sont devenus des standards pour les utilisateurs. Rappelons que le logiciel reste une œuvre de l’esprit au même titre qu’un roman, et cela est aussi difficile d’écrire un nouveau Jules Vernes que d’écrire le code source d’un nouveau Skype…
Quant à nos myriades de Startups, elles n’embauchent pas spécialement de développeurs, préférant gaspiller des fonds européens, des dispositifs d’états et des subventions régionales dans de la communication vaporeuse et des « business » modèles de joueurs de loto : https://startco.lesechos.fr/posts/st...valorisations/ . Il faut dire que nos dirigeants en mal de communication, n’ont n’a pas bien compris le « Story Telling » que nous vend la Californie, notamment l’étape deux : Parce que OUI on peut développer un « Apple 1» dans un garage ! Mais NON on ne peut pas en vendre des milliers sans une vraie force de vente et des moyens significatifs! Le succès commercial d’un produit dépend d’abord de la façon dont il est fabriqué et de la façon dont il est vendu, deux choses qui échappent trop souvent aux financeurs publics et à bon nombre de dirigeants d’entreprises françaises... l’Apple I, s’est d’ailleurs vendu à moins de 200 exemplaires.
Au final, nos startups en mal de démarrage ont vocation à s’expatrier pour passer à l’étape de la profitabilité, de la création de richesse. Et ce non sens économique est souvent montré comme une réussite, mais pourquoi et pour qui ? Pas pour le contribuable français en tout cas. Alors quand est-ce qu’on va enfin investir intelligemment et concrètement dans les IT en France et en Europe ? Et pourquoi pas par investissements directs pour faire produire des technologies qui seront d’abord utiles au pays, à ses institutions, ses entreprises, avant de devenir éventuellement des produits grand publics ! Parce que c’est aussi comme cela que l’informatique américaine s’est construite.
Paradoxalement, La décennie 2020-2030, pourrait être la décennie de tous les dangers pour les gAfAM, qui vont devoir œuvrer à la conservation de leur hégémonie. Le fait qu’ils verrouillent le marché et imposent leurs lois en matière de développement logiciels, d’usage de l’informatique au sens large et de commerce électronique, pourrait encourager l’émergence d’alternatives, d’autant que les systèmes sont devenus sous performants dans cette décennie 2010-2020. Pour la première fois depuis les années 1990, il y aurait même un créneau pour un autre grand système d’exploitation et ses applications de gestions usuelles (peut être même basé sur Linux), et certainement de grandes plateformes internet Européennes (la Chine ne nous ayant pas attendu) … Mais l’Europe peut elle encore réagir ?
Les technologies de l’information, de la communication, de la robotique et tous les processus automatisés qui vont en découler, vont devenir des enjeux de sécurité et de souveraineté pour toutes les nations qui se contenteront de les utiliser. Cette prochaine décennie est celle où l’informatique va commencer à agir sur le monde physique, le monde réel (pas seulement sur des fichiers, des photos, des réseaux). Bien que le cinéma en ait montré les dangers dans plusieurs films de science fictions bien connus, de Terminator à i-Robot, en passant par Blade Runner, Clone, Chappie, ou même des séries comme WestWorld…. Personne en Europe ne semble comprendre qu’une partie de cette fiction va commencer à devenir réalité et que seuls ceux qui maitriseront la fabrication, la production, le déploiement et la maintenance de ces technologies resteront libres au sens géostratégique du terme.
Pour conclure: De la même manière que les Etats devraient relocaliser la production agricole/vivrière (outre pour des raisons écologiques évidentes), pour éviter les catastrophes sanitaires massives que la technologie CRISPR-CAS9 va permettre. Avec la 5G et les cyber-technologies, les Etats doivent repenser les filaires électronique/informatique et relocaliser la production, et pour certains secteurs nationaliser en urgence (réseau, communication, data center, énergie). Hélas nos dirigeants sont tellement occupés à détruire nos services publics...
Autres références:
Qu’est ce donc que la technologie Crispr-cas9 ?
https://www.lemonde.fr/biologie/arti...7_1650740.html
IBM rachète une distribution Linux ! C’est un signe.
https://www.lesechos.fr/28/10/2018/l...de-dollars.htm
Sous traiter la fabrication des composants électroniques est déjà un non sens:
https://slice42.com/a-la-une/2018/10...t-apple-74829/
http://www.lefigaro.fr/secteur/high-...-et-amazon.php
La guerre pour la maitrise des technologies de l’information a déjà commencé:
https://www.lesechos.fr/monde/chine/...rt-2236346.php
Indépendance technologique ! Sans Les Chinois, L’Europe ne pourra pas déployer la 5G ?
http://www.lefigaro.fr/flash-eco/l-u...ux-5g-20190130
En attendant d’avoir un article sur le comment les Japonais nous ont chipé Renault, on peut déjà savoir comment les Américains nous ont dérobé Alstom Energie:
https://www.usinenouvelle.com/editor...-de-ge.N795725
L’Europe manque de réactivité en matière industrielle / économique.
https://www.lemonde.fr/idees/article...4077_3232.html
https://www.lemonde.fr/idees/article...4079_3232.html
https://www.lemonde.fr/idees/article...4076_3232.html
On le sait déjà ; l’Intelligence Artificielle va produire de Concrètes Conneries:
https://www.lemonde.fr/pixels/articl...8_4408996.html