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fcharton2
Ben non... Dans ce cas, l'inégalité joue un rôle moteur. La question de base, à mon avis, c'est "pourquoi se lever le matin, et aller au boulot, et en faire un peu plus que le minimum syndical?". Dans un monde où le salarié rêve de devenir Johnny, ou de gagner au lot, la réponse est, "à quoi bon?". Dans une société où le salarié rêve du trois pièces et de la Megane Scénic de son chef de service, la réponse est "pour le trois pièce et la Mégane Scenic".
C'est précisément ce qui a fait que dans les années 50 et 60 les USA (où le citoyen moyen pouvait espérer progresser socialement) se sont enrichis, et l'URSS s'est cassé la figure, parce que de toutes façons ton avancement n'avait pas grand chose avec ton travail, mais avec la proximité du parti et de l'appareil d'Etat.
Et c'est à mon avis le problème de nos sociétés occidentales. Pour un salarié de base, la position du N+1 ne fait pas rêver, c'est un peu mieux payé, mais les impôts réduisent l'avantage, et le préjudice social augmente au fur et à mesure qu'on monte dans la société. Il y a donc peu de motivation à se lever le matin. Mais en même temps, les jeux de hasard, le loto pour les prolos, les startup pour les jeunes cadres, n'ont jamais autant fait rêver. En fin de compte, ça nous fabrique nos croissances anémiques, nos politiciens normaux qui ne font pas rêver, et ce beau pays où chacun passe sa semaine à rêver de son week end (où il va probablement boire des coups et regarder la télé, yaisse!), et ses années professionnelles à rêver de la retraite (qui sont comme un long week end, avec des rhumatismes, un cancer à la fin...)
Et l'amusant, dans cette histoire, c'est que cette pensée dominante égalitaire, où chacun passe ses journées à se dire que ça ne vaut pas la peine de se bouger, et qu'il faudrait tout changer, est pour les classes supérieures une occasion inespérée de maintenir les inégalités... Le pouvoir le plus solidement établi est celui que personne ne conteste, ou qu'on ne conteste qu'à coup de châteaux en Espagne (de Mélenchon à Podemos, en passant par nos amis les verts). Pour moi, la principale raison de l'accroissement des inégalités, ce n'est pas le complot ploutocratique mondial (avec des vrais bouts de Bilderberg, de juiverie cosmopolites et de franc maçons dedans...), mais l'attitude de nos braves classes moyennes, qui se contentent de ce qu'on leur donne (leurs jours de congés, leur accès gratuit et illimité à Facebook, leurs diplômes ronflants obtenus facilement), et qui ont tellement peu d'ambition (parce que l'ambition, c'est mal, hein?), que les classes dirigeantes sont absolument certaines qu'elles ont très peu de chances d'être jamais inquiétées...
Ah oui, mais la révolution qui vient, et le grand soir? Ben non. Les classes moyennes veulent de l'ordre, et c'est ce qui fait les piètres scores électoraux des "rouges" contemporains.
Donc, non, ce n'est pas pareil. Une société où chacun veut évoluer, et poursuit un objectif atteignable, a tendance à progresser. Notre société, où la moitié du temps de cerveau disponible est passé à tenter d'expliquer pourquoi on n'a pas fait ce qu'on devait faire, et pourquoi ce n'est pas grave et l'autre à se goinfrer de songes creux pour compenser a les inégalités qu'elle mérite... Et ce n'est pas près de changer.
Francois
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