Je crois que nous sommes ici devant des perversions induites par le management moderne, tel que pratiqué par les grands groupes au nom de l'enrichissement permanent, et par les cabinets de conseil.
Il fut un temps où j'étais développeur. Je consacrais 90% de mon temps de travail à développer, le reste à la machine à café ou pour le pause cloppe (à l'époque on pouvait fumer dans les bureaux). De temps en temps le directeur de la salle des marchés pour qui je bossais me demandait où j'en étais et je lui répondais. Quand j'avais besoin d'aide, je regardais si un collègue était la tête dans le guidon ou pas, et j'allais le voir si possible. Tout se passait bien, et mes dates de livraison étaient respectées.
Mes remplaçants, 5 ans plus tard me racontaient qu'ils devaient faire des rétro plannings, des etudes et tout ça. Resultat, moins de 80% de leur temps alloués au développement. Et du coup ils étaient à la bourre et devaient justifier les retards.
Maintenant quand je discute avec des développeurs, ils me disent qu'ils consacrent à peine 60% (dans le meilleur des cas) à leur travail : DEVELOPPER ! Le reste, c'est des stan-up meetings, des réunions, des centaines de mails par jour, des rapports d'activité, des enregistrement de temps passé sur les projets dans un soft de suivi d'activité, du reporting au chef, des présentations power point de 40 pages pour expliquer l'intéret d'un truc à un "top manager" qui de toutes façons ne verra au final que le prix à payer, des points d'équipe, des points clients, des points management, du suivi budgétaire, de al justification budgétaire... Résultat ils sont à la bourre, livent des trucs pas propres, plein de bugs, et doivent après tout justifier poru finalement se faire virer pour insuffisance professionnelle...
Un autre exemple : au début de ma carrière je faisais du support (aussi
). Je passais mon temps à faire du support et tout allait bien, la mécanique tenait la route. Quand je regarde le temps réel de support que font maintenant les équipes support (je parle pas de la prise d'appel mais du support) je suis sidéré ! et encore plus quand un consultant KPMG (ou un autre) lui explique comment il doit maintenant faire son boulot suivant la sacro-sainte bible du management moderne, écrit par des brillants penseurs qui n'ont jamais fait de support de leur vie.
Je pense que l'informatique, qui est en passe de devenir aussi primordiale pour l'homme que l'air qu'il respire souffre de trois maux :
- la démocratisation qui fait que tout le monde s'auto bombarde "informaticien" sans en avoir ni les règles ni les bases ni la formation parce que "en troisième année d'ingénieur option informatique financière, j'ai fait un site web avec du java"
- le management moderne qui veut sans arrêt expliquer à tout le monde comment faire une chose qu'il ne sait pas faire lui même.
- cette manie insupportable de vouloir prendre des ingénieurs là où on a besoin de programmeurs, et qui nous fait des générations d'ingénieurs désabusés et des programmeurs au chômage...
Autant dire qu'il y a peu d'espoir que ça s'améliore...
Partager