Trolldi : le Dark Programming ou l’art d’écrire un code pour tromper les utilisateurs
et les amener à accepter des offres qu'ils ne veulent pas
Lorsqu’ils écrivent leurs programmes, les développeurs ont souvent recours à des pratiques obscures qui sont condamnables du point de vue de la morale ou de la loi. Ces pratiques qui sont connues sous le nom de dark patterns peuvent être intégrées dans un concept que nous pouvons désigner par le Dark Programming ou la programmation côté obscur. Ce sont des astuces utilisées lors du développement de sites Web ou d’applications pour amener les utilisateurs à acheter ou à souscrire à des offres ou services qu'ils ne veulent pas. Mais comment cela fonctionne-t-il ?
Pour faire mordre l'hameçon aux utilisateurs, les développeurs et éditeurs qui font du Dark Programming exploitent le fait que ces derniers ne lisent pas tout ce qu'ils voient sur les pages ou dans les applications. Pour ne pas perdre de temps, les utilisateurs ont tendance à cliquer sur le bouton « suivant » et faire des hypothèses sur ce que les développeurs essaient de dire. Ainsi, si une entreprise veut tromper les utilisateurs, il suffit de présenter un contenu qui donne l'impression qu'elles essaient de dire une certaine chose, puis faire une autre chose que l'utilisateur n’aurait pas acceptée autrement.
Dans le domaine de la publicité, les développeurs utilisent ces techniques pour imposer aux utilisateurs l’affichage de leurs fenêtres publicitaires. On peut citer les fenêtres où le bouton croix, qui sert couramment à fermer la fenêtre, ne marche pas. La figure suivante en donne une illustration.
On peut observer le Dark Programming à différents autres niveaux. D’abord, dans les termes d’utilisation de logiciels ou services. Ici, les entreprises ont parfois recours à de très longs textes et la plupart du temps écrits dans des caractères de petite taille. Sachant que les utilisateurs ne vont probablement pas les lire, elles peuvent donc glisser toutes sortes de conditions que certains n’auraient jamais acceptées, s’ils en avaient connaissance.
On note des pratiques similaires avec les newsletters où la désinscription est impossible. L’utilisateur n’a soit pas la possibilité de se désabonner, soit continue de recevoir les emails après s’être désabonné. Il y a également les sites qui vous informent qu'en poursuivant votre navigation, vous acceptez l'utilisation de cookies, mais qui ne vous donnent pas la possibilité de les refuser.
Les entreprises qui font du Dark Programming
La programmation côté obscur est observable chez de nombreuses entreprises, y compris des grands noms et dans des produits bien connus. On peut citer, parmi ces entreprises, Google, Yahoo, et bien d'autres.
En installant bon nombre de leurs produits, Google et ses pairs demandent par exemple aux utilisateurs de leur permettre de collecter des données pour l'amélioration de ces produits. Le problème est que la demande est dissimulée et une case est cochée par défaut, ce qui les autorise d'office à collecter ces données. Si l'utilisateur ne voit donc pas cette case cochée, il autorise sans le savoir ces entreprises à collecter ses données.
En installant Google Chrome également, le géant de l’internet propose avec la même astuce aux utilisateurs d’activer Chrome comme navigateur pas défaut. Il n’est toutefois pas le seul fournisseur à utiliser cette technique.
On peut citer également Samsung. L’année dernière, un utilisateur a indiqué sur Twitter un comportement bizarre avec le logiciel Magician (qui permet de gérer et d'assurer la maintenance des disques durs Samsung SSD). Le constructeur sud-coréen refusait de faire la mise à jour de son firmware, sauf si on lui donnait l’autorisation de collecter et d’utiliser des données personnelles. Pour information, le logiciel Samsung Magician permet d'accéder à toutes sortes d'informations concernant l'état de votre disque dur Samsung SSD.
On est bien loin de la liste exhaustive. Après Google et Samsung, on peut également citer Adobe. Un utilisateur a noté que lors de l’abonnement au logiciel de montage vidéo et film Premiere Elements 15, qu’Adobe ne donne pas la possibilité de refuser de recevoir des annonces sur ses différents produits et services par email, alors que cette option est en général offerte par les éditeurs.
Dans l’image qui suit, c’est Yahoo qui, en complicité avec des sites de téléchargement de logiciels, essaie de s’inviter sur les machines des utilisateurs. Alors qu’un utilisateur essaie d’installer Java, l’installateur lui recommande de définir Yahoo comme page d’accueil et moteur de recherche par défaut sur Firefox et Internet Explorer, et cette option est activée par défaut. En cliquant sur « Next », l’utilisateur va donc accepter ces changements, mais également les conditions d’utilisation et la politique de confidentialité de Yahoo.
Dans la dernière image qui suit, c’est cette fois Zynga, une société de jeux sociaux qui essaie d’empêcher les utilisateurs de se désabonner de ses notifications par email. La technique utilisée ici est d’utiliser un lien de couleur blanche pour permettre aux utilisateurs de se désabonner. Comme vous pouvez le voir, le lien « Unsusbscribe here » est en blanc sur un fond de page blanc, donc invisible sur la première image, mais visible dans la deuxième quand on sélectionne toute la ligne.
Et vous ?
Avez-vous déjà fait du Dark Programming ? Partagez votre expérience.
Avez-vous déjà détecté des pratiques de ce genre ? En avez-vous déjà été victime ? Par quelles entreprises ? Et via quels produits ?
Voir aussi :
Des programmeurs avouent avoir écrit du code non éthique et parfois illégal en raison des requêtes de plus en plus contraignantes de leurs employeurs
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