La CEDH doit statuer sur la légalité de la surveillance massive opérée par les renseignements britanniques
Mais dénoncée par plusieurs organisations européennes
La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a tenu ce mardi une audience de chambre dans les affaires qui opposent différentes organisations européennes aux services de renseignement du Royaume-Uni. Ces affaires concernent l’interception massive de communications externes par les services de renseignement britanniques et le partage de ces renseignements entre le Royaume-Uni et les États-Unis d'Amérique. Elles sont examinées par une chambre composée de sept juges. À l’issue de l’audience, la Cour s’est retirée pour délibérer, mais son verdict ne sera connu qu’ultérieurement.
Tout à commencer avec les révélations d’Edward Snowden au sujet des programmes de surveillance électronique à grande échelle utilisés aussi bien par les États-Unis que par le Royaume-Uni. Ces programmes d’espionnage avaient pour but l’interception de grandes quantités de communications et le partage des données collectées entre les deux pays. Dans ces affaires, les plaignants estiment que, en raison du caractère sensible de leurs activités, leurs communications ont pu être interceptées par les services de renseignements britanniques et/ou américains.
Lors d’un précédent jugement, l’Investigatory Powers Tribunal (IPT), qui supervise les agences d’espionnage du Royaume-Uni, avait estimé que, en ce qui concerne l’interception massive de communications extérieures par les services de renseignement britanniques, le régime et les garanties respectaient suffisamment les exigences de la jurisprudence de la Cour européenne. L’IPT avait aussi déclaré que la CJUE devrait se prononcer sur la légalité de la législation de surveillance de masse du gouvernement britannique. En effet, cette dernière a déjà tranché dans un cas similaire en attestant du fait qu’il est illégal qu’un gouvernement s’engage dans la « rétention générale et sans discrimination » de données. La CJUE a estimé que seule l’interception ciblée de données et communications est permise.
Trois groupes distincts de requérants ont intenté les affaires dont il est question dans le cadre d’une tentative continue d’empêcher le gouvernement ou les gouvernements incriminés de collecter et de conserver des données de communication en masse.
Le premier groupe est représenté par Big Brother Watch. Cette affaire a été introduite par trois ONG (organisations non gouvernementales) londoniennes et par un établissement universitaire berlinois qui sont réputés pour leur engagement dans la protection de la vie privée et de la liberté d’expression. Le second groupe est représenté par The Bureau of Investigative Journalism. Cette affaire a été introduite par une société de médias et l’une de ses journalistes, Alice Ross.
Le dernier groupe est représenté par dix organisations de protection des droits de l’homme. Cette affaire a été introduite par dix organisations de protection des droits de l’homme en contact régulier avec des ONG, des politiciens, des journalistes, des avocats, des victimes d’abus des droits de l’homme et des lanceurs d’alerte. Les informations que renferment leurs communications comprennent souvent des éléments sensibles et/ou confidentiels. C’est d’ailleurs ce groupe qui, entre juin et décembre 2013, a engagé des procédures en saisissant notamment l’IPT pour dénoncer l’interception massive de communications par les services de renseignement britanniques et le système de partage des renseignements mis en place par cette même entité.
Dans les trois requêtes qu’ils ont soumises à l’examen de la CEDH, les plaignants font état de violations de l’article 8 (droit au respect de la vie privée et de la correspondance) et de violations de l’article 10 (liberté expression). Ils dénoncent aussi le caractère inéquitable de la procédure conduite devant l’IPT, en violation de l’article 6 (droit à un procès équitable) et de l’article 14 (interdiction de discrimination). Les trois requêtes ont été introduites devant la CEDH le 4 septembre 2013, le 11 septembre 2014 et le 20 mai 2015, respectivement. Elles ont été communiquées au gouvernement britannique le 9 janvier 2014, le 5 janvier 2015 et le 24 novembre 2015.
Source : ACLU, Communiqué de presse du Greffier de la Cour
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