Plusieurs pays d’Europe utiliseraient les données téléphoniques des migrants pour valider ou rejeter leurs demandes d’asile,
violation de la vie privée ou acte nécessaire et légitime ?
Depuis quelques années, l’Europe fait face à un afflux de migrants provenant de divers horizons. Alors que ces personnes en quête d’une nouvelle vie se chargent de plusieurs affaires lors de leurs voyages, une des choses qui est commune aux migrants est qu’ils disposent en général d’un téléphone. Pour certains, cela permet de rester en contact avec leur famille restée au pays et pour d’autres, cela permet d’avoir en permanence les informations utiles avec leurs passeurs pour que leur périple se déroule convenablement. En 2016, l’agence des Nations Unies pour les réfugiés a signalé que les téléphones étaient si importants pour les migrants qui se déplaçaient à travers l’Europe, qu’ils dépensaient jusqu’à un tiers de leurs revenus en crédits téléphoniques.
Si le téléphone constitue un équipement nécessaire pour le voyage et facilite à plus d’un titre la tâche aux migrants, ce dernier pourrait être utilisé à leur désavantage une fois arrivés au bout de leurs voyages. En effet, de plus en plus les pays d’Europe se réfèrent aux téléphones des migrants dans le processus d’analyse des demandes d’asile déposées par les migrants. En 2017, l’Allemagne et le Danemark ont étendu les lois permettant aux agents d’immigration d’extraire des données des téléphones des demandeurs d’asile. Une législation similaire aurait été proposée en Belgique et en Autriche, tandis que le Royaume-Uni et la Norvège auraient fouillé les dispositifs des demandeurs d’asile pendant des années, fait remarquer Wired.
Ces dispositions font surface dans plusieurs pays d’Europe, car les migrants en général connaissent les lois qui régissent l’Europe et n’hésitent pas à donner de fausses informations pour se faire accepter dans tel ou tel pays. Pour disposer d’informations fiables afin de traiter avec plus de clarté les demandes d’asile des réfugiés, les agents d’immigration de certains pays n’hésitent pas dans certains cas à interroger directement les appareils des migrants qui regorgent d’informations précieuses et qui en disent long sur le passé des migrants ainsi que leur parcourt avant d’arriver dans le pays d’accueil.
Pour récolter les données dans les téléphones des migrants, chaque pays se tourne vers son outil. L’Allemagne par exemple utiliserait un programme nommé Atos qui associe la technologie de deux sociétés mobiles, à savoir T3K et MSAB. Avec ce programme, il ne faut que quelques minutes pour télécharger les métadonnées des téléphones des migrants. Les données récoltées serviraient à rechercher des incohérences dans les déclarations des demandeurs d’asile. Toutefois, un porte-parole de l’agence d’immigration allemande précise que « l’analyse des données de téléphonie mobile n’est jamais la seule base sur laquelle une décision sur la demande d’asiles est prise », avance Wired.
En plus de l’Allemagne, le Danemark également utiliserait les données personnelles issues des téléphones des migrants pour mieux apprécier la véracité de leurs déclarations. Pour ce qui concerne le Danemark, en plus d’utiliser des outils pour extraire des données, les agents d’immigration de ce pays demanderaient également aux migrants leurs mots de passe Facebook pour vérifier leur identité.
Du côté britannique, les choses seraient encore plus poussées. Après avoir eu connaissance des outils utilisés par les fonctionnaires d’immigration britanniques, Christopher Weatherhead, technologue à Privacy International, l’ONG britannique chargée de la protection de la vie privée, affirme que « ce qui nous a surpris, c’était le niveau de détail de ces recherches téléphoniques. La police peut accéder à des informations auxquelles vous n’avez pas accès, comme des messages supprimés ». Ces capacités leur sont fournies par le logiciel de l’entreprise israélienne Cellebrite. Ce logiciel est capable d’accéder à l’historique de recherche, y compris l’historique de navigation supprimé. Il peut également extraire des messages WhatsApp de certains téléphones Android.
Au vu de ces pratiques, certaines voix se sont fait entendre et ont dénoncé les moyens utilisés ces services d’immigration pour s’assurer que les informations fournies par les migrants sont véridiques. Michala Clante Bendixen, du mouvement d’accueil des réfugiés danois, déclare ceci : « À mon avis, c’est une violation de l’éthique de la vie privée que de demander un mot de passe à Facebook ou d’accéder au téléphone portable de quelqu’un ». Elle ajoute que « pour un demandeur d’asile, c’est souvent la seule pièce d’espace personnel et privé qu’il ou elle a laissé ».
Toutefois, face à la violation dont certaines personnes font mention, d’autres personnes n’hésitent pas à souligner le fait que ces informations contenues dans ces téléphones peuvent également aider à valider la demande d’asile des migrants. Dans ce cas, ce serait plus qu’utile de faire recours à ces programmes d’extraction de données téléphoniques.
Au regard des avantages et inconvénients concédés à l’usage de ces programmes d’extraction de données téléphoniques, pensez-vous qu’ils devraient être utilisés par les agents d’immigration ou plutôt devraient-ils être délaissés pour motif de violation de la vie privée ?
Source : Wired
Et vous ?
Êtes-vous d’accord sur le fait que les agents d’immigration devraient utiliser les programmes pour extraire les données téléphoniques des migrants en vue de leur analyse ?
Ou pensez-vous que les agents d’immigration violeraient la vie privée des migrants avec ces programmes et donc devraient les abandonner ?
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