Une Américaine poursuit le service des douanes des USA en justice après la saisie de son iPhone pendant 120 jours
pour refus de divulgation de son mot de passe lors d’un contrôle douanier
Depuis plusieurs années, le CBP (Customs and Border Protection), le service des douanes et de la protection des frontières des États-Unis procède à des contrôles aux postes-frontière. Ces contrôles qui sont pratiqués aux frontières de tous les pays trouvent leur exception aux États-Unis en ce sens qu’ils peuvent aller des simple questionnements à des fouilles plus étendues comme l’inspection du contenu des dispositifs électroniques (téléphones, tablettes, ordinateurs, etc.).
Récemment, une femme américaine en la personne de Rejhane Lazoja a également fait les frais de ces inspections qui sont décriées par de nombreuses personnes entrant aux États-Unis. Alors que Rejhane Lazoja revenait d’un séjour effectué en Suisse en février dernier, elle fut soumise à des contrôles à l’aéroport de Newark, aux États-Unis. Comme plusieurs personnes, les agents des douanes lui ont demandé de leur fournir le mot de passe de son iPhone afin de le déverrouiller. Cette dernière a opposé un refus à cette requête, ce qui lui a valu la confiscation son appareil. Cent vingt (120) jours plus tard, le téléphone confisqué lui a été retourné sans autre forme de notification. Cette situation qui ne fut pas du goût de Mme Lazoja a été portée devant le tribunal du New Jersey, aux États-Unis, pour plusieurs motifs.
La plaignante allègue que les agents frontaliers ont pris une copie des données sur son smartphone et ne lui ont pas signifié si elles avaient été supprimées ou pas. En outre, elle soutient que le service des douanes a manqué de lui préciser si les données collectées avaient été partagées avec d’autres agences du gouvernement. Il faut souligner que le smartphone contenait des photographies de Mme Lazoja dans un « état dévêtu », ainsi que des messages privés de son avocat. Cette situation est assez embarrassante pour la plaignante, car « Mme Lazoja est une femme musulmane et porte un hijab (un voile) conformément à ses croyances religieuses. En vertu de ses convictions sincères, Mme Lazoja ne peut pas être vue dans un état déshabillé [sans son voile] par des hommes qui ne sont pas membres de la famille », souligne la plainte.
Selon les documents juridiques issus de la plainte déposée, « il n’y avait pas non plus de cause probable ni de mandat [pour fouiller le téléphone]. Par conséquent, la fouille et la saisie des biens de Mme Lazoja ont violé ses droits en vertu du quatrième amendement », indique le dépôt. En effet, en général les lois des USA prévoient qu’il est nécessaire d’obtenir un mandat avant de pouvoir procéder à la fouille du contenu des appareils électroniques d’un citoyen américain. Mais une disposition spéciale baptisée « border search exception » permet aux autorités fédérales de perquisitionner et fouiller les appareils électroniques sans mandat à moins de 160 km d’une frontière américaine. En cas de refus, l’appareil peut être saisi. Ce serait donc en référence à cette disposition que les agents des douanes aux USA exigent les mots de passe des appareils des voyageurs lors des contrôles aux frontières du pays.
À noter que ces contrôles sont devenus tellement invasifs qu’à l’instar de Mme Lazoja, un groupe d’une dizaine de personnes, composé entre autres d’un développeur en informatique, un vétéran de l’armée, un ingénieur de la NASA et deux journalistes, a lancé en 2017 une procédure judiciaire à l’encontre du ministère de la Sécurité intérieure des USA. Les plaignants reprocheraient à l’administration Trump d’encourager la poursuite de pratiques contraires à la Constitution du pays au sein de certains organes de l’État, notamment lors de recherches effectuées sans mandat sur les téléphones et les ordinateurs portables des citoyens américains qui sont arrêtés à la frontière par les agents du CBP.
Mais il n’y a pas que les voyageurs aux États-Unis qui font face à ce problème lors de leur entrée sur le territoire. En 2015 au Canada, Alain Philippon, un ressortissant québécois, revenant d’un voyage effectué en République dominicaine est sommé de fournir le mot de passe de son téléphone BlackBerry alors qu’il traverse la frontière canadienne pour entrer dans son pays. Après avoir refusé de se soumettre à cette mesure, le téléphone a été saisi. Mais en plus de cela, Alain Philippon a été mis en garde à vue pour avoir empêché l’officier des services de douane de l’agence canadienne de faire une chose qu’il est autorisé à faire en vertu de la présente loi.
À la lumière de ces évènements, il n’est pas étonnant de voir des préoccupations légitimes être soulevées aussi bien par les voyageurs que les utilisateurs en général. Mais ces plaintes pourront-elles freiner ces contrôles, quand on sait que le nombre d’appareils inspectés aux USA est passé de 8383 à 14 993 entre 2016 et 2017 ? Mme Lazoja pourra-t-elle obtenir gain de cause et faire changer les choses ?
Source : BBC
Et vous ?
Quel est votre avis sur la plainte de Mme Lazoja contre le service de douanes ? Est-elle fondée ?
Ou pensez-vous que Mme Lazoja a tort de porter l’affaire devant la justice et devrait plutôt coopérer comme tout le monde le fait ?
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