L’IA constitue-t-elle une menace contre l’emploi ? Non, elle en créera des millions de plus qu’elle n’en détruira, selon Byron Reese
Voici comment
Les progrès rapides de l’intelligence artificielle (IA) annoncent une nouvelle ère, celle des machines capables d’apprendre par elles–mêmes (Machine Learning) et de mimer les réseaux de neurones du cerveau humain pour un apprentissage profond (Deep Learning). Certes, aujourd’hui, l’IA est encore limitée dans certains domaines mais elle démontre déjà sa puissance dans d’autres surpassant parfois l’homme. Par exemple, aux jeux, les algorithmes d’IA se montrent parfois plus coriaces. En juillet 2018, le blog DeepMind annonçait que l’IA a battu le record des humains au Quake III, un jeu de tir en vue subjective. Quelques jours avant, des algorithmes d’OpenAI ont coopéré pour battre une équipe constituée de cinq des amateurs les plus forts dans le jeu Dota 2, un jeu stratégie d'équipe connu pour être extrêmement compliqué.
L’IA a également réalisé un exploit dans le domaine de la médecine, selon un rapport publié en juin dernier, en battant 15 médecins humains dans un concours de diagnostic de tumeurs cérébrales. En effet, le système BioMind AI, développé par le centre de recherche sur les troubles neurologiques de l'hôpital Tiantan de Pékin en Chine et une équipe de recherche de la Capital Medical University, a établi des diagnostics corrects dans 87 % des 225 cas en 15 minutes, alors qu'une équipe de 15 médecins a seulement atteint une précision de 66 %.
Cependant, ces exploits de l’IA aux jeux, dans le domaine de la médecine et dans divers autres domaines menacent-ils l’emploi ? Cette question est devenue récurrente, mais si elle l’est, c'est parce que l'IA occupe une place prépondérante dans les discussions relatives au travail et à son avenir. Certains s’accordent sur le fait que l’IA va détruire de nombreux emplois dans certains secteurs d’activités. En avril 2018, Un rapport d’étude concluait que l'IA pourrait faire disparaître 47 % des emplois aux États-Unis durant les deux prochaines décennies et accentuer davantage l'inégalité des revenus durant cette période. Pour joindre un exemple à ces conclusions de recherche, en 2016, Amazon avait ouvert le premier magasin sans caisses aux États-Unis, remplaçant les employés par des détecteurs et la vision par ordinateur.
D’autres, par contre, pensent que l'IA va créer de nouveaux emplois pour remplacer les emplois qui aura détruit. C’était aussi la position du cabinet Gartner en décembre 2017 où il soutenait que l'intelligence artificielle va créer plus d'emplois qu'elle ne va en éliminer d'ici 2020. Cette position est partagée par Byron Reese, d'après son article publié hier.
Byron Reese est le PDG et l'éditeur de la société de recherche technologique Gigaom. Il est également le fondateur de plusieurs entreprises de haute technologie. Il s’intéresse depuis longtemps à l’interaction de la technologie avec l’histoire humaine. Reese a publié un article le mardi selon lequel l’IA créera des millions d’emplois supplémentaires qu’elle n’en détruira tout en tentant d’expliquer comment cela va se faire.
Dans son article l’auteur s’est intéressé à la préoccupation grandissante selon laquelle l’IA dans son progrès pourrait ravir aux humains la majorité des emplois créant un bassin de chômeurs incapables de rivaliser économiquement avec les machines. Selon l’auteur, cette préoccupation, bien que compréhensible, n’est pas fondée car l'IA sera le plus grand moteur de travail que le monde ait jamais connu.
Les progrès technologiques ne menacent pas l’emploi
Selon Byron Reese, les progrès technologiques radicaux ne sont pas un phénomène nouveau. Toutefois, selon lui, ceux qui accusent l’IA d’être destructrice massive d'emploi peuvent être excusés car il est plus facile de voir les emplois existants, auxquels s’applique cette nouvelle technologie, perturbés que d’envisager les nouveaux emplois créés par la technologie. Selon Reese, c’est depuis 250 ans que l’humanité assiste à un progrès continu de la technologie, cependant, aux États-Unis, le chômage est resté entre 5 et 10 % pendant presque tout ce temps, même lorsque la machine à vapeur et l’électricité, des nouvelles technologies radicales, ont fait leur apparition.
Mais, il n’est pas nécessaire de remonter plus loin le temps pour se rendre compte que le progrès technologique n’est pas seulement synonyme de la destruction des emplois. L’auteur nous invite juste à considérer l’ère de l’Internet et à remonter de 25 ans, au moment de l’apparition du premier navigateur Web, qui a conduit aujourd’hui la connexion des milliards d'ordinateurs à un réseau géant à l’échelle mondiale. Les pessimistes auraient supposé que cette technologie affecterait négativement les agents de voyage et les courtiers en valeurs mobilières, car l’Internet s’apprêtait à changer les habitudes de correspondance, d’achat, d’information, etc. Et sur la base de ces suppositions, ils auraient peut-être conclu que l’'Internet serait destructeur des emplois.
Cependant, bien que ces changements prévisibles se soient effectivement opérés – moins de lettres à envoyer et moins de journaux papier à acheter, etc. –, plusieurs autres changements inattendus ont eu lieu grâce à ce progrès technologique, l’Internet, selon l’auteur. Des milliers de nouvelles entreprises valant des milliards de dollars ont été crées offrant des millions d’emplois. Pratiquement tout le monde entier a été impacté positivement par cette nouvelle technologie. De nombreuses nouvelles carrières ont vu le jour : du concepteur de sites Web au spécialiste des données en passant par le marketing en ligne. La création des entreprises multinationales a été facilitée. De vastes réserves d'informations ont été mises à la libre disposition et utilisées par les entrepreneurs et des chercheurs du monde entier pour créer de nouveaux types d'entreprises.
L’IA, créatrice d’emplois
A l’image du guichet automatique, qui est censé être un bon instrument de destruction d’emplois mais qui, au lieu de cela, réduit les coûts d'ouverture de succursales et permet aux banques d’en ouvrir davantage pour embaucher plus de caissiers, l'intelligence artificielle créera des millions d'emplois bien au-delà de ce à quoi nous nous attendons, selon Reese.
A titre d’exemple, selon le Bureau of Labor Statistics (BLS) des États-Unis, le principal établissement du gouvernement américain dans le domaine de l'économie du travail et des statistiques, la demande de traducteurs humains est en train d’exploser, avec la maîtrise de la traduction par l’IA. En, effet la traduction simple de base faite par l’IA minimise le coût des relations commerciales avec ceux qui parlent des langues étrangères, motivant les entreprises à accroître leurs activités à l’étranger. Ce qui est facteur de création de plus d’emplois de traducteurs humains, qui eux font des traductions plus complexes.
Selon l’auteur, BSL prévoit une croissance de l’emploi supérieure à la moyenne dans l’IA dans plusieurs professions telles que les professions de comptabilité, techniciens en géologie, rédacteurs techniques, etc. Toutefois, comme pour l’Internet, le gain d’emploi proviendra de là où nous nous y attendons le moins.
Pour soutenir l’absolue capacité de création d’emplois de l’IA, Byron Reese étale la mauvaise interprétation par les médias, selon lui, d’un rapport de recherche de Carl Frey et Michael Osborne. En effet, selon l’interprétation des médias « 47 % des emplois seront perdus au profit de la technologie » aux Etats-Unis. Selon l’auteur, ce que Carl Frey et Michael Osborne ont en réalité dit, c’est que certaines fonctions dans 47 % des emplois seront automatisées et non que 47 % des emplois disparaîtront. Selon Reese, ceux dont l’emploi sera touché par cette automatisation vont simplement faire des choses différentes parce qu'une grande partie de ce qu'ils font aujourd'hui sera automatisée.
L’IA devrait être adoptée dans l’entreprise
D'après Byron Reese, un rapport d'Accenture, cabinet international de conseil et de technologie, intitulé « Retravailler la révolution » et publié en janvier 2018, estimait que de nouvelles applications de l'intelligence artificielle combinées à une collaboration humaine pourraient générer jusqu'à 10 % d'emplois dans le monde entier d'ici 2020.
Selon Reese, l'intelligence artificielle apportera un changement positif plus grand que celui apporté par chacun des progrès technologiques précédents à savoir l’électricité, la mécanisation, et bien d’autres progrès. Selon lui, les précédentes technologies n’ont pas privé les humains d’emplois, l’IA en fera autant, mieux, elle créera plus d’emplois que les autres technologies. C’est ainsi que fonctionne les économies libres, selon Byron Reese.
Toutefois se posera un besoin de mise à niveau afin de pouvoir s'adapter aux nouvelles compétences qu'imposera l'IA. Selon un article de BBC publié en août dernier, l'économiste en chef de la Banque d'Angleterre attirait l'attention sur le fait que l'IA pourrait menacer de nombreux emplois et qu'une révolution des compétences serait nécessaire.
Source : Byron Reese
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