Le fabricant de cartes mères Super Micro délocalise sa production hors de Chine
Pour s’affranchir des suspicions d'espionnage de ses clients US
Super Micro, le fabricant américain de cartes mères, a demandé à ses fournisseurs de délocaliser leur production hors de Chine d’après un récente publication de la revue Asian Nikkei. La manœuvre fait suite à la formulation d’inquiétudes de ses clients américains à propos de l’espionnage chinois. En effet, en décembre de l’année dernière, Bloomberg a rapporté que les puces Super Micro étaient livrées avec des portes dérobées chinoises et que c'était la raison pour laquelle Apple avait mis fin à son contrat avec Super Micro.
Avec 60 % de ses revenus issus des États-Unis, Super Micro est le troisième plus gros fabricant de serveurs derrière HP et DELL. Cependant, après des allégations selon lesquelles les cartes-mères de ses serveurs étaient expédiées avec des portes dérobées chinoises, les ventes de l'entreprise ont chuté de manière significative. Super Micro risque maintenant de perdre sa troisième place sur le marché au profit d'Amazon, d'après une analyse que Betty Shyu, analyste serveur chez Digitimes, a partagée avec Nikeei Asian Review.
Parmi les fournisseurs de cartes-mères de Super Micro, on compte Wistron de Taiwan (un assembleur d'iPhone), Pegatron, Universal Scientific Industrial, Orient Semiconductor Electronics de Taiwan, ainsi que sa propre filiale taiwanaise Compuware Technology.
Super Micro avait déjà commencé à transférer sa production de cartes mères de la Chine vers Orient Semiconductor Electronics basé à Taïwan lorsque le différend commercial entre les États-Unis et la Chine s'est aggravé au quatrième trimestre 2018, selon les sources que la revue Asian Nikkei cite. Les allégations de porte dérobée n'ont fait qu'accélérer le mouvement.
Super Micro n’est pas la seule entreprise à délocaliser hors de Chine
D’après des statistiques de Digitimes Research rapportées par la revue Asian Nikkei, plus de 90 % des cartes-mères étaient fabriquées en Chine en 2017. Depuis lors, de nombreux fabricants ont commencé à délocaliser leur production hors de Chine, et en 2018, moins de 50 % des cartes mères y ont été produites. Super Micro s'est aligné à cette tendance et l'entreprise fabriquerait désormais moins de 50 % de ses serveurs en Chine. Elle prévoit également d'augmenter à l'avenir la production en interne de serveurs afin d'éliminer tout risque perçu. À l'heure actuelle, les activités en interne tournent autour de l'assemblage, les pièces elles-mêmes étant sous-traitées à d'autres fournisseurs qui les ont généralement fabriquées en Chine.
Retour sur "The Big Hack"
C’est ainsi que Bloomberg avait appelé ce qui pourrait être l’un des plus grands programmes d’espionnage commercial d’un État-nation. D’après cette publication montée sur la base de documents fournis par ses informateurs et de « preuves additionnelles », des hackers chinois ont infiltré les cartes-mères de Super Micro via des portes dérobées physiques. D’après Bloomberg, le présumé piratage chinois touchait plus de 30 entreprises américaines (clients de Super Micro) dont Apple et Amazon.
Apple et Amazon ont tous deux nié les allégations selon lesquelles leurs serveurs Super Micro auraient été piratés peu après la publication de Bloomberg.
Toutefois, en 2017, l’éditeur The Information a signalé qu'en 2016, les serveurs Super Micro d'Apple ont été mis à jour avec des microprogrammes malveillants provenant directement du site de support de Super Micro. Le logiciel malveillant aurait infecté l'environnement serveur de l'App Store d'Apple ainsi que le laboratoire de conception de l'entreprise. Apple a, là également, nié les retours selon lesquels l’entreprise aurait mis fin à son contrat avec Super Micro pour cet incident et renvoyé tous les serveurs Super Micro qu'elle avait achetés avant ce dernier.
Dans la même publication, Bloomberg a également fait état de ce qu'Amazon a découvert une puce minuscule dans les serveurs Super Micro utilisés par Elemental – une société dont Amazon a fait l'acquisition en 2015. Bloomberg a indiqué qu'Amazon avait signalé la puce potentiellement malveillante aux enquêteurs américains. Ces derniers auraient amené au grand jour le fait que la puce avait été mise au point par des agents de l'Armée chinoise. Seulement, les autorités américaines ont nié l'existence de cette enquête.
Que les portes dérobées matérielles soient une réalité ou non, il semble clair que la publication de Bloomberg a affecté négativement la confiance des clients dans Super Micro ainsi que ses ventes. L'entreprise tenterait d'y remédier en déplaçant sa production à l'extérieur de la Chine, mais la manœuvre suffira-t-elle a provoquer un regain de confiance ?
Source : Asian Nikkei
Et vous ?
La délocalisation hors de Chine constitue-t-elle la solution ultime aux problèmes d’espionnage ? Si non, par quel bout les différents acteurs de la chaîne doivent-ils se saisir de cette préoccupation ?
En admettant que ce soit la Chine qui est le problème, quelles alternatives viables ?
Voir aussi :
Le FBI a résolu un mystère vieux de 15 ans entourant le malware Fruitfly Mac qui était utilisé pour espionner les victimes via leur webcam ou micro
Les caméras de reconnaissance faciale : outils de sécurité ou d'espionnage de masse ? La Chine et d'autres pays adoptent de plus en plus ces outils
Vault 7 : un ancien agent de la CIA a été accusé d'avoir divulgué des informations sur les outils d'espionnage de la CIA à WikiLeaks
Kaspersky Lab expose une opération de cyberespionnage pouvant être liée à la Russie, alors que l'entreprise est accusée d'aider les espions russes
« Espionnage Élysée » : les États-Unis sont derrière l'espionnage de la France, a confirmé l'ancien directeur technique de la DGSE
Partager