Obligation de proposer des pièces d'occasion et indice de réparabilité, ce que prévoit le gouvernement
pour limiter les déchets électroniques
Le gouvernement français a dévoilé la semaine dernière en Conseil des ministres son projet de loi « relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire ». Ce projet présenté par M. François de Rugy, ministre de la transition écologique et solidaire, et Mme Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et solidaire, vise à « construire l’écologie du quotidien ». Il prévoit notamment le passage d'un modèle de consommation linéaire où l'on « extrait [les ressources naturelles], consomme, jette » à un modèle circulaire où l'on « extrait moins, consomme mieux, répare et recycle ».
Les constructeurs de matériels informatiques et produits high-tech sont donc ciblés par ce projet qui va les contraindre à payer plus pour la gestion des déchets électroniques (e-waste) qui avec la révolution technologique n'ont cessé d'envahir la Planète, mettant ainsi en péril l'environnement. L'électronique représente en effet le flux de déchets qui croît le plus rapidement dans le monde, avec 50 millions de tonnes produites en 2018. C'est ce qu'a révélé un rapport datant de janvier 2019 de PACE (Platform for Accelerating the Circular Economy), une plateforme lancée par le Forum économique mondial.
Le projet de loi, qui sera examiné par le Parlement à la rentrée, s’articule autour de trois principaux axes, à savoir : renforcer l’information du consommateur sur la qualité et les impacts environnementaux des produits qu'il consomme ; mettre fin au gaspillage pour préserver les ressources naturelles ; et mobiliser les industriels pour non seulement transformer les modes de production, mais mieux gérer les déchets.
Renforcer l'information du consommateur veut surtout dire lui permettre facilement de savoir si le produit qu'il achète est réparable. En effet, en France, seules 40 % des pannes des produits électriques et électroniques donnent lieu à une réparation. Le projet de loi ambitionne de passer à 60 % d'ici cinq ans et, pour y arriver, mise sur l'instauration d'un indice de réparabilité, qui permettra sans doute de lutter contre l'obsolescence programmée. « Nous voulons développer la réparabilité, et une économie plus sobre en exploitation des ressources naturelles », explique la secrétaire d'État. Ainsi, à compter du 1er janvier 2021, certains équipements électriques et électroniques (liste à préciser par un décret) devraient comporter une information sur leur réparabilité, sur le modèle de l’étiquette énergie. Cette information est élaborée sur la base d’un référentiel développé par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) en concertation avec les industriels.
En complément d'un indice de réparabilité pour les produits électroniques, les industriels se verront dans l'obligation de proposer des pièces de rechange d'occasion à la place des pièces neuves, comme c'est le cas pour les réparations automobiles. Le gouvernement estime en effet que l'utilisation de pièces détachées issues de l’économie circulaire « permettra de diminuer le coût de la réparation, de réduire ainsi la production de déchets, et de développer l’activité économique de réparation, tout en favorisant le pouvoir d’achat des consommateurs ». L’information sur la disponibilité des pièces détachées nécessaires à la réparation des équipements électroniques sera par conséquent obligatoire. Le délai de fourniture des pièces détachées par le fabricant ou l’importateur sera en outre réduit, passant de deux mois à vingt jours.
Les produits électroniques concernés, lorsqu'ils sont mis sur le marché à destination des ménages, devraient encore faire l’objet d’une signalétique (logo Triman par exemple qui signifie que le produit est recyclable) informant le consommateur que ce produit fait l’objet de règles de tri. Cette signalétique doit être accompagnée d’une information précisant les modalités de tri ou d’apport du déchet issu du produit.
Pour inciter les constructeurs à assumer leurs responsabilités, le projet de loi prévoit un système de bonus-malus. Les fabricants dont les produits remplissent les critères de performance environnementale (incorporation de matière recyclée, emploi de ressources renouvelables, durabilité, réparabilité, possibilités de réemploi, recyclabilité, présence de substances dangereuses, etc.) bénéficieront d’un bonus sur la contribution qu’ils versent pour la gestion et le traitement de la fin de vie de leurs produits. Quant à ceux qui n’intègrent pas l’écoconception dans leur manière de produire, ils verront leur contribution augmenter avec un malus. Précisons aussi que ce projet ne cible pas que les constructeurs électroniques, mais l'ensemble des industriels dans le but de réduire le gaspillage des ressources naturelles de manière générale.
Sources : Projet de loi, Étude d'impact du projet
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