Google Assistant et Siri d'Apple renoncent à écouter vos conversations de manière temporaire,
après avoir été épinglés pour leurs pratiques
Google doit cesser d'écouter les enregistrements vocaux des utilisateurs de son logiciel Assistant dans l'Union européenne, ont annoncé jeudi des régulateurs allemands. Ceux-ci estiment que le recours à des assistants vocaux de fournisseurs tels que Google, Apple et Amazon présente un risque élevé pour la confidentialité et la protection de la vie privée des personnes concernées. Ceci s’applique non seulement aux personnes qui exploitent un assistant vocal, mais également à tous ceux qui entrent en contact avec celui-ci (par exemple lorsqu’ils vivent dans un ménage) où l’équipement est utilisé (par exemple un foyer où Google Assistant est installé).
Le service Assistant du géant de la recherche, similaire à Alexa et Amazon et à Siri d'Apple, permet aux utilisateurs d'utiliser leur voix pour allumer une lumière ou capter l'actualité de la matinée grâce à des dispositifs tels qu'un haut-parleur intelligent Google Home, un téléphone Android ou un iPhone.
Sur la base de multimédias diffusés par les lanceurs d'alerte, les médias ont récemment annoncé que Google utilisait son assistant vocal Google Home pour évaluer les enregistrements vocaux afin d'améliorer les capacités de reconnaissance vocale de Google Assistant. Dans ces évaluations, les employés de Google ou de sociétés mandatées entendent les enregistrements vocaux et les transcrivent pour analyser si les informations acoustiques enregistrées ont été traitées correctement par le système sous-jacent, une pratique que Google a reconnu dans un billet de blog.
En effet, le mois dernier, Google a confirmé que des travailleurs tiers analysant les données vocales d'Assistant avaient divulgué des conversations néerlandaises privées. Le radiodiffuseur public belge VRT NWS a déclaré que plus de 1 000 fichiers avaient été divulgués, y compris des enregistrements de cas où des utilisateurs avaient accidentellement déclenché le logiciel de Google.
Comme les rapports des lanceurs d’alerte l'ont montré, les conversations enregistrées (parfois délicates) reposaient sur des informations issues de la sphère privée et personnelle analysées par le personnel affecté à Google. De plus, une partie non négligeable des enregistrements était due à une activation incorrecte.
Google a déclaré qu'il avait « suspendu » les analystes de données audio après la fuite aux Pays-Bas. La société a également déclaré travailler avec les régulateurs allemands.
« Nous sommes en contact avec l'autorité de protection des données de Hambourg. Nous évaluons actuellement la manière dont nous conduisons les analyses audio et aidons nos utilisateurs à comprendre comment les données sont utilisées », a déclaré une porte-parole dans un communiqué. « Ces analyses contribuent à rendre les systèmes de reconnaissance vocale plus inclusifs des différents accents et de dialectes dans différentes langues. Nous n'associons pas de clips audio à des comptes d'utilisateur pendant le processus de révision, nous n'effectuons des révisions que pour environ 0,2% de tous les clips ».
Dans ce contexte, le commissaire à la protection des données et à la liberté de l'information de Hambourg (HmbBfDI) a ouvert une procédure administrative interdisant à Google d'effectuer de telles évaluations par des employés ou des tiers pendant une période de trois mois. Il estime que cela devrait protéger les droits à la vie privée des personnes affectées pour le moment.
Bien que, selon le règlement général sur la protection des données, l’autorité de contrôle principale doit être celle qui est dans le pays où se situe le siège européen de l’entreprise (pour Google, il s'agit de l'IDPC en Irlande), le RGPD offre aux autorités de protection des données des autres États membres la possibilité de prendre des mesures sur leur territoire ou leur zone de responsabilité pour une période maximale de trois mois en cas de nécessité urgente de protéger les droits et libertés des personnes concernées. L’Allemagne estime que c’est le cas ici, car une protection efficace des personnes concernées par l’écoute, la documentation et l’évaluation des conversations privées par des tiers ne peut être réalisée que par une exécution rapide.
Au cours de cette procédure administrative, Google a déclaré à HmbBfDI que les transcriptions d’enregistrements vocaux n’étaient plus en cours et pendant une période d’au moins trois mois à compter du 1er août 2019. Cette assurance s’applique à l’UE dans son ensemble. À cet égard, l’Allemagne pense que les autorités compétentes devraient faire rapidement la même chose pour d'autres fournisseurs de systèmes d'assistance vocale, tels qu’Apple ou Amazon, afin de mettre en œuvre les mesures appropriées.
Johannes Caspar, commissaire chargé de la protection des données et de la liberté de l'information à Hambourg, a déclaré : « L'utilisation de systèmes d'assistance vocale dans l'Union européenne doit être conforme aux exigences du RGPD en matière de protection des données. Dans le cas de Google Assistant, les doutes sont importants. L'utilisation des systèmes d'assistance vocale doit être faite de manière transparente, afin qu'un consentement éclairé des utilisateurs soit possible. Cela implique notamment de fournir des informations suffisantes et d'informer de manière transparente les personnes concernées sur le traitement des commandes vocales, mais également sur la fréquence et les risques d'activation erronée. Enfin, il faut tenir dûment compte de la nécessité de protéger les tiers affectés par les enregistrements. Tout d’abord, d’autres questions sur le fonctionnement du système d’analyse de la parole doivent être clarifiées. Les autorités chargées de la protection des données devront ensuite décider des mesures définitives nécessaires pour une opération conforme à la confidentialité ».
D'autres grandes enseignes de la technologie ont été critiqués pour la façon dont ils utilisent leurs données vocales. Amazon a déclaré qu'un nombre « extrêmement faible » d'enregistrements Alexa étaient annotés afin d'améliorer ses systèmes de reconnaissance vocale. Les entrepreneurs Apple auraient également entendu des enregistrements privés, y compris des informations médicales, selon un rapport publié le mois dernier. Apple a confié qu'une « petite partie » des données est utilisée pour améliorer Siri et les commandes vocales.
Toutefois, dans un communiqué, Apple a expliqué « Pendant que nous effectuons un examen approfondi, nous suspendons l’analyse des conversations Siri au niveau mondial. De plus, dans le cadre d’une future mise à jour logicielle, les utilisateurs auront la possibilité de choisir de participer au programme ». L'entreprise va donc introduire bientôt une option de consentement qui n’existait pas jusqu’ici.
Si Apple arrête son programme d’écoute partout dans le monde, la suspension des écoutes Google Assistant ne concerne que l’Europe pour une durée de trois mois, le temps de conduire des enquêtes suite à la fuite de plus de 1000 fichiers de données de conversations. Apple a promis l’introduction prochaine d’une option de consentement. Ce n’est pour le moment pas le cas du côté de Google.
Source : régulateurs allemands, VRT NWS, Google
Et vous ?
Avez-vous déjà utilisé un assistant vocal ? Lequel ? À quelle fréquence ?
Le trouvez-vous utile ou le considérez-vous plutôt comme un gadget ? Dans quelle mesure ?
Que pensez-vous de la décision de suspendre temporairement les écoutes ?
Google devrait-il s'inspirer d'Apple et arrêter les écoutes dans le monde au lieu de se cantonner à l'Europe ? Pourquoi ?
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