Microsoft demande que les autorités antitrust fassent un examen approfondi des app stores,
Afin de vérifier la manière dont certaines pratiques commerciales affectent la concurrence
Apple est dans l’impasse depuis le début de cette semaine, le fabricant de l'iPhone étant pris dans un débat en cours sur sa décision controversée de rejeter la nouvelle application de messagerie Hey. Des remarques faites jeudi par Brad Smith, le président et directeur juridique de Microsoft, ne vont certainement pas améliorer ce climat déjà tendu. S'exprimant lors d'une interview accordée à Politico cette semaine, M. Smith, a estimé qu'il était temps pour les autorités de régulation antitrust aux États-Unis et en Europe de discuter des tactiques utilisées par les app stores pour profiter de ceux qui veulent distribuer leurs logiciels, a rapporté Bloomberg.
Bien que M. Smith n’a pas nommé la boutique du fabricant de l'iPhone lors de l’interview, Bloomberg s’est rassuré auprès d’un porte-parole de Microsoft qu’il faisait référence à l’App Store d'Apple, dont les directives font l’objet d’insurrection des développeurs depuis cette semaine. Les régulateurs antitrust européens ont ouvert mardi une enquête sur les politiques d'Apple, affirmant que les développeurs pourraient être injustement contraints de fournir une part des revenus de la boutique de la société.
« Si vous regardez l'industrie aujourd'hui, je pense que ce que vous trouverez est de plus en plus souvent des app stores qui ont créé des murs plus hauts et des portes bien plus formidables pour accéder à d'autres applications que tout ce qui existait dans l'industrie il y a 20 ans », a dit M .Smith. « Ils imposent des exigences qui disent de plus en plus qu'il n'y a qu'une seule façon d'accéder à notre plateforme, et c'est de passer par la porte que nous avons nous-mêmes créée. Dans certains cas, ils créent un prix très élevé pour un péage, dans d'autres cas, 30 % de toutes vos recettes doivent aller au gardien du péage si vous voulez ».
Selon M. Smith, certains apps tores créent une barrière à la concurrence et à l'accès équitable bien plus importante que celle qui existait pour Windows de Microsoft lorsqu'il a été reconnu coupable de violations des règles de concurrence il y a 20 ans. « Je crois que le temps est venu, que nous parlions de Washington DC ou de Bruxelles, d'avoir une conversation beaucoup plus ciblée sur la nature des app stores, les règles qui sont mises en place, les prix et les péages qui sont extraits, et s'il y a vraiment une justification dans la loi antitrust pour tout ce qui a été créé », a dit le directeur juridique de Microsoft.
Les critiques et les plaintes contre les pratiques App Store n’ont pas commencé maintenant, mais cette semaine pourrait entrer dans l'histoire comme un tournant pour l'App Store d'Apple. Une récente décision du géant américain est à l’origine des débats de cette semaine. Apple a d'abord approuvé l'application Hey la semaine dernière, mais a ensuite décidé lundi qu'elle enfreignait les règles d’achat in-app de l'App Store. Ce comportement a indigné les responsables de Basecamp, qui est à l’origine de l’application. Apple a été accusé d'agir comme un monopoliste et un tyran par le président de la sous-commission antitrust de la Chambre.
« En raison de son pouvoir de marché, Apple facture des loyers exorbitants - des vols de grand chemin, en substance - en intimidant les gens pour qu'ils paient 30 % ou en leur refusant l'accès à son marché », a déclaré le député David Cicilline. « C'est écraser les petits promoteurs qui ne peuvent tout simplement pas survivre avec ce genre de paiements. S'il y avait une réelle concurrence sur ce marché, cela n'arriverait pas ».
La décision d'Apple a mis en lumière les politiques confuses de l'App Store, tout comme la Commission européenne a annoncé une enquête antitrust formelle sur l'App Store et Apple Pay. Elle intervient également quelques jours avant la conférence annuelle WWDC d'Apple pour les développeurs, mettant la société dans une position délicate pour organiser un événement destiné à inciter les développeurs à créer des applications pour ses plateformes.
Microsoft a été confronté à ses propres problèmes avec l'App Store d'Apple
Brad Smith et Microsoft ont bien évidemment une certaine expérience et un certain historique des affaires d'antitrust, après avoir été reconnus coupables d'abus de monopole lié à son offre groupée d'Internet Explorer dans Windows il y a près de 20 ans. Microsoft a finalement été contrainte d'ouvrir davantage Windows aux développeurs tiers, et ses pratiques ont été surveillées de plus près pendant des années. La Commission européenne est allée encore plus loin, en ordonnant à Microsoft de créer une version distincte de Windows sans son Windows Media Player intégré et de permettre que les consommateurs puissent choisir le navigateur Internet de leur choix.
Les préoccupations de Microsoft concernant l'App Store d'Apple sont par conséquent claires. Microsoft a également été confronté à ses propres problèmes avec l'App Store d'Apple. Comme les autres développeurs sur la plateforme d'Apple, le fabricant de logiciels doit accorder à Apple une commission de 15 à 30 % de tout abonnement à un logiciel tel que Microsoft Office ou leur programme de messagerie électronique Microsoft Outlook. Microsoft ne peut pas non plus inciter ses clients à s'inscrire sur son site Web, car cela permettrait de contourner les frais d'Apple. SkyDrive (maintenant appelée OneDrive) pour les iPhone s'est retrouvé bloqué dans une bataille pour la commission de 30 % des revenus en 2012.
Plus récemment, Microsoft s'est battu pour lancer son service de streaming de jeux xCloud sur iOS. La société a lancé une version d'aperçu, mais « pour se conformer aux politiques de l'App Store », l'application ne comprend qu'un seul jeu et est limitée par rapport à la version Android. Microsoft n'a pas révélé exactement pourquoi xCloud est limité par les politiques de l'App Store. Apple a déjà révisé ses politiques App Store pendant la WWDC 2018 afin d'autoriser les applications mobiles comme le service de streaming de jeux Steam Link de Valve, mais xCloud et Google Stadia n'ont pas pu être lancés complètement dans l'App Store.
Apple double maintenant ses efforts pour défendre ses politiques en matière d'App Store, mais un nombre croissant d'entreprises appellent au changement. A commencer par Spotify qui a déposé une poursuite judiciaire l’année dernière, et Rakuten en début de cette année, ce qui a conduit au lancement de deux enquêtes mardi par les autorités antitrust de la Commission européenne sur l’App Store et Apple Pay. « Il semble qu'Apple ait obtenu un rôle de "gardien" en ce qui concerne la distribution des applications et du contenu aux utilisateurs des appareils les plus populaires d'Apple », a déclaré Margrethe Vestager, chef de la division antitrust de l'UE, dans un communiqué mardi.
Apple a réagi à la nouvelle de l'enquête mardi en déclarant : « Il est décevant que la Commission européenne avance des plaintes sans fondement de la part d'une poignée d'entreprises qui veulent simplement un tour gratuit, et ne veulent pas jouer selon les mêmes règles que tout le monde ». Apple s’est toutefois réjoui de pouvoir prouver à la Commission européenne qu'il a un objectif simple en tête. « En fin de compte, notre objectif est simple : que nos clients aient accès à la meilleure application ou au meilleur service de leur choix, dans un environnement sûr et sécurisé. Nous sommes heureux de pouvoir montrer à la Commission européenne tout ce que nous avons fait pour que cet objectif devienne réalité ».
A la suite de Spotify et Rakuten, Epic Games, Match Group, Microsoft, Kobo, et d'autres font maintenant connaître leurs sentiments. Et ces appels vont probablement se multiplier à mesure que l'UE poursuit ses enquêtes. Mais pourraient-ils contraindre Apple à revoir ses directives ? Pour l’heure, en ce qui concerne Hey, la société reste ferme sur ses positions et confirme sa décision controversée de rejeter l'application de messagerie électronique de l'App Store.
Source : Bloomberg
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