L'UE cherche à obtenir de nouveaux pouvoirs pour pénaliser les géants de la technologie,
Les entreprises pourraient être démantelées ou forcées de vendre leurs activités européennes
L'Union européenne veut s'armer de nouveaux pouvoirs pour pénaliser les grandes entreprises technologiques, a rapporté dimanche le quotidien économique Financial Times. Le plan proposé prévoit de forcer les géants de la technologie à démanteler ou à vendre certaines de leurs opérations européennes si leur domination du marché est jugée menacer les intérêts des clients et des petits rivaux, lit-on dans le quotidien.
La pression s’accroît sur les activités européennes des géants de la technologie, qui sont composés essentiellement des entreprises américaines comme Facebook, Google et Twitter. L’Union européenne serait en train de renforcer ses pouvoirs afin de les réglementer. Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, a déclaré dans un entretien avec le Financial Times que les solutions proposées, qui ne seraient utilisées que dans des circonstances extrêmes, comprennent également la possibilité d'exclure totalement les grands groupes technologiques du marché unique.
Un nouveau système de notation, dans lequel la note des entreprises serait mesurée par leur comportement dans des domaines tels que le respect des obligations fiscales et la rapidité avec laquelle elles suppriment les contenus illégaux, est envisagé par Bruxelles. Ce système de notation permettra au public et aux parties prenantes d’évaluer ces entreprises.
« Les utilisateurs finaux de ces plateformes ont le sentiment qu'ils sont trop gros pour s'en soucier », a déclaré M. Breton, qui dirige la révision des règles numériques dans l'Union. "[Dans] certaines conditions, nous pouvons également avoir le pouvoir d'imposer une séparation structurelle », a-t-il ajouté.
La question des contenus illégaux et de la désinformation en ligne a suscité des inquiétudes au sein de l'opinion publique dans un certain nombre de pays, et les grandes entreprises technologiques sont soumises à la pression des régulateurs. Aux États-Unis, Facebook et Twitter ont dû retirer les messages qu'ils jugeaient compromettants et ne respectant pas la politique de leurs plateformes. Et les patrons de la big tech, dont Jeff Bezos d'Amazon et Mark Zuckerberg de Facebook, ont eu du mal à convaincre les membres du Congrès qu'ils avaient été poussés par plus que leur propre intérêt lorsqu'ils ont construit leurs empires numériques.
Au Royaume-Uni, un nouvel organisme de surveillance aura la possibilité d'imposer des amendes sans devoir passer par les tribunaux. Le nouveau régulateur technologique, qui sera créé après l’achèvement du Brexit, contrôlera des sociétés comme Facebook et Google et aura le pouvoir d'appliquer de nouvelles règles visant à limiter les problèmes anticoncurrentiels et à protéger les données des consommateurs contre l'utilisation et la vente sans autorisation. L’organisme devrait également permettre une plus grande accessibilité des données aux consommateurs.
Les nouveaux commentaires de M. Breton arrivent alors que l'UE a lancé au début de l'année une consultation publique sur une nouvelle loi sur les services numériques, qui vise à offrir un cadre juridique moderne qui réglementera les contenus en ligne. Une fois promulguée, Bruxelles se verra attribuer davantage de pouvoirs pour examiner la manière dont les entreprises technologiques recueillent des informations sur les utilisateurs.
La DSA, l’initiative de loi sur les services numériques, actualisera la directive sur le commerce électronique, adoptée en 2000 lorsque la plupart des acteurs dominants du secteur en étaient à leurs débuts ou n'existaient pas encore, d’après le journal économique.
Les entreprises qui empêchent les utilisateurs de changer de plateforme seront les plus sévèrement sanctionnées
Selon le quotidien économique, la nouvelle législation européenne augmenterait les pouvoirs de Bruxelles pour examiner la façon dont les entreprises technologiques recueillent des informations sur les utilisateurs, suite aux inquiétudes soulevées par des chercheurs indépendants que les groupes de divulgation volontaire font sont souvent trompeurs ou partiels.
Le commissaire européen au marché intérieur a confirmé que l'UE ne supprimerait pas la responsabilité limitée que les entreprises ont pour le contenu publié sur leurs plateformes. « La sphère de sécurité de l'exemption de responsabilité sera maintenue », a déclaré M. Breton. « C'est quelque chose qui est accepté par tout le monde ».
En avril 2019, le Parlement européen a approuvé le projet de loi pour obliger les entreprises du numérique à supprimer les contenus terroristes dans un délai d’une l'heure sous peine de lourdes sanctions financières pouvant aller jusqu'à 4 % du chiffre d'affaires annuel mondial en cas de « manquement systématique » à leurs obligations. L’UE a décidé de réglementer parce qu'elle a estimé que les entreprises du numérique n'en faisaient pas assez dans le cadre de mesures volontaires, même si la première heure est la plus importante pour endiguer la propagation virale du contenu en ligne.
Maintenant, les régulateurs de Bruxelles établissent une liste noire des activités que les entreprises technologiques seraient tenues d'éliminer. Ils proposent une échelle mobile de sanctions en cas de non-conformité, pouvant aller jusqu'à la séparation de certaines opérations. M. Breton a déclaré que le projet de législation sera prêt avant la fin de cette année.
Les activités qui pourraient entraîner des sanctions plus sévères comprennent les entreprises qui empêchent les utilisateurs de changer de plateforme ou qui forcent les clients à n'utiliser qu'un seul service, a-t-il ajouté.
Thierry Breton a également comparé le pouvoir des grandes plateformes avec celui des banques avant la crise financière, en disant que les régulateurs doivent prendre des mesures similaires aujourd'hui pour les contenir. « C'est comme si les petites et les grandes banques n'avaient pas les mêmes règles : vous avez plus de flexibilité pour les petits acteurs et, bien sûr, lorsque vous devenez une [banque] systémique, vous avez un ensemble de règles [différent] », a-t-il déclaré.
M. Breton a déclaré que le nouveau système de surveillance sera basé sur un effort collectif entre les gouvernements nationaux et l'UE. « Nous avons besoin d'une meilleure supervision pour ces grandes plateformes, comme nous l'avons fait pour le système bancaire [après la crise financière] », a-t-il déclaré. Les propositions sont en cours de finalisation, et une fois qu'elles auront été approuvées, elles passeront par le Parlement européen et le Conseil européen.
Selon le Financial Times, un fonctionnaire européen a averti que Bruxelles devra trouver le bon équilibre pour ne pas se faire prendre par son propre piège. « Aller trop loin peut aussi se retourner contre vous et vous faire marquer un but personnel », a déclaré le fonctionnaire. « D'un autre côté, une ambition trop faible ne répondra pas aux préoccupations [concernant les grandes technologies] », a-t-il ajouté.
Source : Financial Times
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