27 lois sur le "droit de réparation" ont été proposées cette année,
Mais des géants comme Apple ont fait en sorte qu'aucune ne soit adoptée jusqu'à présent
Le mouvement "droit de réparation" a pris de l'ampleur à mesure que les consommateurs, les ateliers de réparation indépendants, les écoles, les agriculteurs et d'innombrables autres personnes en ont assez des tentatives des entreprises de monopoliser la réparation. Qu'il s'agisse des fabricants de consoles de jeux comme Sony qui empêchent la réparation par des tiers ou des géants de la technologie comme Apple qui intimident les ateliers de réparation indépendants, plus les entreprises restreignent l'accès aux réparations bon marché, aux pièces, aux outils et à la documentation, plus ce mouvement semble prendre de l'ampleur. Un récent rapport vient d’établir que 27 lois sur le "droit de réparation" ont été proposées cette année, mais des géants comme Apple ont fait en sorte qu'aucune ne soit adoptée jusqu'à présent.
Un certain nombre de rapports ont été publiés sur la législation relative au "Right To Repair" ou (droit de réparation) aux États-Unis, et un nombre égal de rapports sur les efforts déployés par Apple pour empêcher les nouveaux projets de loi sur la réparation d'avoir force de loi. Un nouveau rapport publié sur le droit de réparation, qui montre comment Apple, Amazon, Google et autres se sont efforcés de mettre un terme aux lois qui obligeraient les entreprises technologiques à fournir des pièces de rechange authentiques et des schémas d'appareils aux ateliers de réparation indépendants.
Rien qu'en 2021, 27 États ont examiné des projets de loi sur le droit de réparation, mais plus de la moitié d'entre eux ont déjà été rejetés ou annulés. Les lobbyistes et les groupes commerciaux représentant les grandes entreprises technologiques les ont combattus avec acharnement, Apple faisant spécifiquement valoir que ces lois pourraient entraîner des dommages aux appareils. Alors qu’il luttait contre les initiatives de Right to Repair en Californie en 2019, le fabricant d’iPhone a fait valoir que les consommateurs se blesseraient en perforant accidentellement les batteries des appareils Apple lors de tentatives de réparation.
Apple a continuellement fait pression contre la législation sur le droit de réparation dans plusieurs États. Une telle législation obligerait les entreprises comme Apple à fournir des pièces de rechange et des outils, et à mettre à la disposition du public des informations sur les réparations. Les appareils Apple sont notoirement difficiles à réparer en raison de leurs petits composants exclusifs et de leur grande quantité d'adhésif. Le site de réparation iFixit donne aux produits Apple des notes de réparation presque universellement basses.
À Washington, par exemple, la démocrate Mia Gregerson de la Chambre des représentants a parrainé une mesure sur le droit à la réparation qui a été combattue cette année par ces entreprises technologiques, ainsi que par les lobbyistes représentant Apple. « Si vous voulez vraiment savoir qui était méchant, c'était Apple », a déclaré Mia Gregerson. Les lobbyistes ont déclaré qu'Apple soutiendrait les programmes de réparation dans les collèges locaux si le projet de loi était abandonné.
Les lobbyistes de Google et d'Amazon se sont rendus au Colorado cette année pour aider à étouffer une proposition. Les groupes commerciaux représentant Apple ont réussi à enterrer une version dans le Nevada. Les télécoms, les entreprises d'électroménager et les sociétés médicales se sont également opposées à ces mesures, mais peu d'entre elles ont la force de lobbying et l'argent de ces géants de la technologie. Alors que les entreprises technologiques font l'objet d'un examen très médiatisé à Washington, elles exercent discrètement leur pouvoir dans les États pour façonner les politiques publiques et éliminer les lois indésirables.
Apple s'est opposé à des projets de loi dans d'autres États, dont le Colorado. Justin Millman, propriétaire d'un atelier de réparation indépendant, a déclaré qu'il avait du mal à trouver des écrans d'iPad, des réparations dont les écoliers ont souvent besoin. Il affirme qu'Apple s'oppose aux programmes de réparation pour inciter les gens à acheter de nouveaux appareils. « C'est pour cela qu'Apple ne répond pas à mes emails », a-t-il dit. « Pour eux, c'est juste des dollars et des centimes. Ils ne pensent pas à la personne qui se trouve de l'autre côté de l'iPad ».
Le système actuel, source de gaspillage, mais lucratif pour les grandes entreprises technologiques
En 2017, l’US Copyright Office a suggéré au gouvernement des États-Unis d’aller dans le sens du mouvement Right To Repair en adoptant des mesures pour légaliser et vulgariser définitivement la réparation de tous les appareils électroniques du consommateur, même si cela implique de pirater le logiciel du produit. La bataille se poursuit puisque les entreprises technologiques concernées par lesdits développements font du lobbying pour contrer le Fair Repair Act.
Le système actuel, défectueux et source de gaspillage est extrêmement lucratif pour les grandes entreprises, même s'il nuit à la planète, contrarie d'innombrables consommateurs et rend la vie quotidienne plus coûteuse pour les districts scolaires. Selon Millman, environ 10 à 15 % des appareils d'un district doivent être réparés au cours d'une année scolaire normale. Un district de Long Island avec lequel il travaille a plus de 13 000 iPad en circulation. Il estime que les coûts de réparation s'élèvent à environ 130 000 dollars par an. Si le district devait remplacer tous les iPad cassés, plutôt que de les réparer, ce coût grimperait d'un quart du million de dollars.
Il est difficile de faire passer une réforme lorsque vous avez une vaste coalition de sociétés extrêmement riches et puissantes qui travaillent toutes de concert pour la combattre. Mais certaines régions du monde continuent de se battre pour assurer ce droit aux consommateurs. Depuis mars, toutes les entreprises qui vendent des appareils électroménagers tels que des réfrigérateurs, des machines à laver, des sèche-cheveux ou des téléviseurs dans l'Union européenne doivent garantir à leurs clients que ces appareils pourront être réparés pendant une période pouvant aller jusqu'à dix ans, dans le cadre d’une nouvelle législation de l’UE sur le "droit de réparation".
Le droit de réparation des appareils électroniques fait partie de l'effort plus large de l'UE visant à réduire l'empreinte écologique des produits manufacturés en les rendant plus durables et plus efficaces sur le plan énergétique. En vertu des nouvelles règles européennes, les fabricants devront garantir la disponibilité des pièces de rechange pendant une période pouvant aller jusqu'à dix ans. Les nouveaux appareils devront également être accompagnés de manuels de réparation et être fabriqués de manière à pouvoir être démontés à l'aide d'outils conventionnels.
En ce qui concerne la France, depuis juin 2020, un « indice de réparabilité » est entré en vigueur dans le pays dans le cadre de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire en France. L’objectif est de substituer le modèle économique qui repose sur la quasi-obligation des consommateurs à acquérir de nouveaux appareils alors que les anciens sont encore fonctionnels. L’indice de réparabilité participe ainsi à l’allongement de la durée de vie des appareils et induit l’économie de la consommation de ressources premières et l’émission de gaz à effet de serre.
Pour se conformer à cette loi, Apple a révélé les cotes de réparabilité de différents modèles de MacBook et d'iPhone sur l'application Apple Store et sur son site Web en France en mars. Les scores de réparabilité affichés par Apple pour ses appareils ont montré à quel point ils sont difficiles à réparer.
Alors qu’Apple se bat contre les projets de loi sur le droit de réparation, il a tenté de proposer des alternatives. Le fabricant d’iPhone a annoncé en mars dernier qu’il étendait à plus de 200 pays son programme mondial de réparation indépendante conçu pour fournir aux ateliers de réparation qui ne sont pas des prestataires de services agréés par Apple des pièces d'origine, des outils, des manuels de réparation et des diagnostics pour effectuer des réparations hors garantie sur les appareils Apple.
Le programme est gratuit, mais les réparateurs doivent faire appel à un technicien certifié par Apple pour effectuer les réparations, ce qui constitue un obstacle à l'entrée pour certains ateliers comme celui de Millman. Même avec ce programme, certaines pièces, comme les écrans des iPad, ne sont pas fournies, ce qui laisse Apple et son programme "Apple Authorized Service Provider (AASP)" comme seule option de réparation. Apple affirme que le processus de certification est "simple" et gratuit, et qu'une fois qu'un employé est devenu un technicien certifié, les fournisseurs de réparation admissibles peuvent acheter des pièces et des outils Apple authentiques au même prix que les AASP. Selon Apple, il existe plus de 1 500 centres de réparation indépendants aux États-Unis, au Canada et en Europe.
Et vous ?
Quel est votre avis à ce sujet ?
Selon vous, la lutte pour le droit de réparation aboutira un jour ? Les entreprises comme Apple abdiqueront-elles à un moment donné ?
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