Le fabricant de puces pour l'IA Cerebras dépose une demande d'introduction en bourse pour affronter Nvidia
qui domine largement le marché des puces pour l'IA avec plus de 80 % des parts
Cerebras Systems, qui fabrique des puces pour l'IA, a déposé son prospectus en vue d'une introduction en bourse. Elle prévoit d'être cotée au Nasdaq sous le symbole « CBRS ». L'annonce est intervenue après que la société a triplé son chiffre d'affaires l'année dernière grâce à la hausse de la demande pour les puces d'IA. L'action Nvidia, leader du marché des puces pour l'IA, a plus que doublé en valeur de marché cette année, faisant brièvement de Nvidia l'entreprise la plus précieuse au monde. Cerebras s'affiche en tant que nouveau concurrent de Nvidia, tandis que ce dernier fait l'objet d'une enquête des États-Unis pour abus de position dominante.
Cerebras Systems va entrer en bourse pour surfer davantage sur la vague de l'IA
Cerebras Systems est une société américaine fondée en 2016 spécialisée dans les puces pour l'IA. Il est en concurrence avec Nvidia, dont les processeurs graphiques (GPU) sont le choix principal de l'industrie pour la formation et l'exécution des grands modèles de langage (LLM). La société indique sur son site Web que sa puce WSE-3 est dotée de plus de cœurs et de mémoire que la célèbre puce H100 de Nvidia. Il s'agit également d'une puce physiquement plus grande. Outre la vente de puces, Cerebras propose également des services basés sur cloud computing qui s'appuient sur ses propres grappes de calcul.
Cerebras a annoncé son intention d'entrer en bourse, probablement afin de profiter davantage de la course à l'IA et capter l'argent des investisseurs. Bien que des rapports indiquent que les investisseurs commencent à craindre que l'IA ne leur apporte pas les profits considérables escomptés, l'introduction en bourse de Cerebras servira probablement de test décisif pour l'appétit du marché concernant l'IA. La technologie souffre d'un battage médiatique intense.
Cerebras dit avoir enregistré une perte nette de 66,6 millions de dollars au cours des six premiers mois de 2024 pour un chiffre d'affaires de 136,4 millions de dollars. Pour les six premiers mois de 2023, la société a enregistré une perte nette de 77,8 millions de dollars et un chiffre d'affaires de 8,7 millions de dollars. Pour l'ensemble de l'année 2023, Cerebras a déclaré une perte nette de 127,2 millions de dollars pour un chiffre d'affaires de 78,7 millions de dollars.
En outre, la société a déclaré une perte nette de 50,9 millions de dollars pour un chiffre d'affaires de 69,8 millions de dollars au deuxième trimestre, contre une perte de 26,2 millions de dollars et un chiffre d'affaires de 5,7 millions de dollars pour la même période de l'année précédente. « Les dépenses d'exploitation ont augmenté cette année en partie à cause de la hausse des frais de personnel pour soutenir la croissance du chiffre d'affaires », a déclaré Cerebras.
Une introduction en bourse pourrait aider Cerebras à améliorer ces performances financières. Les puces d'IA constituent un marché en pleine expansion et très encombré. Les hyperscaleurs tels que Google, Microsoft et Amazon ont développé leurs propres puces d'IA. Cerebras a déclaré que Group 42, une société spécialisée dans l'IA basée aux Émirats arabes unis qui compte Microsoft parmi ses investisseurs, représentait 83 % de ses revenus l'année dernière.
Après son annonce, Cerebras a reçu le soutien d'un certain nombre d'investisseurs de premier plan, dont le fonds Abu Dhabi Growth Fund, et Coatue Management. Citigroup, Barclays, UBS Investment, Wells Fargo Securities et Mizuho figurent parmi les souscripteurs de l'offre. Cerebras prévoit d'être cotée au Nasdaq Global Market sous le symbole « CBRS ». La société basée à Sunnyvale, en Californie, n'a pas divulgué les conditions ou la taille de son offre.
Le marché des introductions en bourse dans le secteur technologique a été peu actif en 2024, la hausse des taux d'intérêt ayant poussé les investisseurs à se tourner vers des actifs rentables. L'application de médias sociaux Reddit a été introduite à la Bourse de New York en mars, et le fabricant de logiciels de gestion de données Rubrik a suivi en avril.
Cerebras est-il capable de concurrencer des acteurs bien établis comme Nvidia ?
Selon les informations révélées par l'entreprise elle-même, le principal investisseur dans Cerebras est la société de capital-risque Foundation Capital, suivie de Benchmark et d'Eclipse Ventures. Alpha Wave, Coatue et Altimeter détiennent chacun au moins 5 % du capital. Parmi les autres investisseurs figurent le PDG d'OpenAI, Sam Altman, et le cofondateur de Sun Microsystems, Andy Bechtolsheim. La seule personne à détenir 5 % ou plus est Andrew Feldman, cofondateur et PDG de Cerebras. Précédemment, Andrew Feldman a vendu la startup de serveurs SeaMicro à AMD pour environ 355 millions de dollars en 2012.
Selon le dossier déposé par Cerebras, en mai 2024, Group 42 s'est engagé à acheter 1,43 milliard de dollars de commandes à Cerebras avant mars 2025. Group 42 détient actuellement moins de 5 % des actions de classe A de Cerebras, et l'entreprise a la possibilité d'en acheter davantage en fonction de la quantité de produits Cerebras qu'elle achète. Comme plusieurs de ces rivaux, les puces d'IA de Cerebras sont fabriquées par le géant des semiconducteurs TSMC.
Cerebras a averti les investisseurs que toute perturbation éventuelle de la chaîne d'approvisionnement pourrait nuire à l'entreprise. Outre Nvidia, l'entreprise cite AMD, Intel, Microsoft et Google comme concurrents, diverses entreprises privées. Mais selon des critiques, Cerebras est loin d'être un concurrent de taille face à Nvidia. Nvidia est considéré comme le plus grand bénéficiaire de la course à l'IA, et détient plus de 80 % du marché des accélérateurs pour l'IA.
La « puce » de Cerebras n'est pas vraiment une puce, c'est une plaquette entière sur laquelle de nombreuses puces ont été gravées. Ci-dessus, le dernier semiconducteur de Cerebras, le CS-3 wafer-scale engine (WSE). Il est appelé ainsi parce que le CS-3 est une plaquette entière, alors qu'une plaquette est découpée en milliers de semiconducteurs individuels après avoir été gravée dans la plaquette de silicium. Le WSE-3 compte 4 000 milliards de transistors.
La puce WSE-3 de Cerebras peut être considérée comme l'équivalent d'une cinquantaine de puces Nvidia H100 connectés ensemble. Notons que Cerebras vise les centres de données pour l'IA avec un produit de cette taille. Contrairement à un GPU Nvidia, qui peut être utilisé dans un ordinateur de bureau ou même un ordinateur portable, avec Cerebras, cela serait impossible. (Les puces Nvidia sont quant à elles également adaptées aux centres de données.)
Les produits de Cerebras sont comme des bêtes de somme qui exécutent des charges de calcul intenses dans les centres de données pour la formation des modèles d'IA et pour l'inférence (lors de l'exécution de l'IA). « Le seul avantage de Nvidia par rapport à ses rivaux est son langage logiciel extrêmement bien développé pour ses GPU - CUDA - et sa communauté de développeurs », peut-on lire dans les commentaires dans la communauté.
Cela signifie en effet que pour travailler avec Cerebras, les développeurs doivent apprendre à utiliser le produit et les logiciels associés. Par conséquent, les développeurs et les entreprises déjà habitués aux produits de Nvidia pourraient se montrer réticents à l'idée. Il est également important de souligner que Cerebras est une cible de rachat. La vraie question sera de savoir si Cerebras sera acquise avant ou après son entrée en bourse.
Nvidia fait l'objet d'une enquête antitrust pour abus de position dominante
En août 2024, les États-Unis ont lancé une enquête antitrust sur Nvidia. L'enquête fait suite à des plaintes de concurrents selon lesquelles Nvidia a abusé de sa position dominante sur le marché des puces d'IA. Les actions de Nvidia ont chuté d'environ 3,6 % dans les échanges après l'annonce de l'enquête. Les enquêteurs du ministère américain de la Justice (DOJ) cherchent à savoir si Nvidia a fait pression sur les fournisseurs de cloud computing pour qu'ils achètent plusieurs de ses produits. L'enquête cherche également à savoir si Nvidia a usé de stratagèmes pour empêcher ses clients d'acheter auprès de ses rivaux.
Nvidia a rejeté les allégations du DOJ, affirmant que les pratiques de l'entreprise favorisent une concurrence équitable. « Nous sommes compétitifs sur la base de décennies d'investissement et d'innovation, en adhérant scrupuleusement à toutes les lois, en rendant Nvidia ouvertement disponible dans chaque cloud et sur site pour chaque entreprise, et en veillant à ce que les clients puissent choisir la solution qui leur convient le mieux », a déclaré Nvidia.
Au début de l'année, Google, Samsung, Intel, ARM et Fujitsu, se sont réunis au sein de la Fondation UXL pour s'attaquer à la domination de Nvidia sur le marché lucratif des puces pour l'IA. L'objectif affiché de la Fondation UXL est d'éliminer les barrières logicielles propriétaires qui ont permis à Nvidia de dominer le marché de l'IA. Notamment, l'initiative s'attaque à la plateforme CUDA de Nvidia, utilisée par plus de 4 millions de développeurs dans le monde.
CUDA est disponible depuis une quinzaine d'années. Conçu pour ne cibler que les GPU Nvidia, il arrive que les développeurs qui connaissent le développement CUDA soient contraints de choisir les GPU Nvidia. Ce qui a fait de Nvidia l'un des grands gagnants de la course à l'IA. À titre illustratif, lors de l'événement Computex 2023, le PDG de Nvidia, Jensen Huang, a déclaré que quatre millions de développeurs utilisaient le modèle informatique CUDA de l'entreprise.
De nombreux critiques accusent Nvidia de limiter le choix des développeurs, ce qui lui permet de garder une avance sur ses rivaux et d'en tirer plein de profits. Afin de briser la domination de Nvidia dans le domaine de l'IA, la Fondation UXL veut proposer en proposant une alternative open source à CUDA. Si la Fondation UXL réussit son pari, cela pourrait permettre d'éviter que les développeurs d'IA soient enfermés dans la technologie propriétaire de Nvidia.
Le support hétérogène recherché par l'organisation est destiné à inclure non seulement les CPU et les GPU, mais aussi d'autres accélérateurs, y compris les FPGA, bien que l'intérêt récent pour l'accélération de l'IA se soit largement concentré sur les GPU. Bien entendu, il ne sera pas facile de contester la domination de Nvidia sur le marché des puces d'IA. La Fondation UXL vise à terme à prendre en charge le matériel et le code de Nvidia.
Toutefois, de nombreux clients ont déjà investi de grosses sommes d'argent dans des projets basés sur la pile logicielle de Nvidia et pourraient ne pas voir de raison de changer. De nombreux développeurs sont familiers avec CUDA et pourraient hésiter à sauter le pas.
Source : Cerebras Systems
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