L'ancien PDG de Google, Eric Schmidt, estime que nous devrions nous lancer à fond dans la construction de centres de données d'IA, car « de toute façon, nous n'atteindrons jamais nos objectifs climatiques »
Eric Schmidt, homme d'affaires et ancien PDG de Google, fait une nouvelle déclaration tonitruante sur l'IA qui suscite la polémique. Cette fois-ci, il a laissé entendre que les progrès de l'IA sont plus importants que la préservation du climat. Il a affirmé qu'il est temps que l'industrie investisse pleinement dans l'infrastructure de l'IA, car les objectifs climatiques sont de toute façon trop ambitieux pour être atteints. Sa déclaration tend à démontrer que les objectifs climatiques que les Big Tech se sont fixés ne sont rien d'autre qu'un écran de fumée et de l'écoblanchiment et que le capitalisme ainsi que les perspectives de rendement de l'IA l'emportent sur tout le reste.
Eric Schmidt : les besoins de l'IA d'abord, la résolution des défis climatiques passera après
Eric Schmidt est un homme d'affaires américain avec une fortune personnelle estimée à plus de 23 milliards de dollars. Il a dirigé Google de 2001 à 2011 et est également connu pour avoir des positions très controversées sur la technologie. En août 2024, par exemple, s'adressant à des étudiants, il les a invités à ne pas avoir peur de voler les données dont ils ont besoin pour entraîner leurs modèles d'IA. Il a dit aux étudiants qu'une fois qu'ils auront réussi et gagné beaucoup d'argent, ils pourront alors engager une armée d'avocats pour réparer les dégâts. Cette déclaration lui a valu notamment de nombreuses critiques.
Plus récemment, s'exprimant lors d'un sommet sur l'IA à Washington DC, Eric Schmidt a déclaré que nous ne devrions pas nous inquiéter de la consommation d'énergie galopante de l'IA, car la meilleure façon de résoudre les problèmes liés au changement climatique est de la mettre au service de l'IA. Pourtant, les chercheurs qui construisent l'IA ne voient en quoi elle pourrait aider à résoudre les défis climatiques, car dans sa forme actuelle, l'IA est incapable d'innover.
Selon les rapports, l'ancien PDG de Google a déclaré que toute initiative visant à réduire les quantités croissantes d'énergie consommées pour développer et former des modèles d'IA de plus en plus avancés est futile et devrait être simplement abandonné en faveur d'une approche sans restriction de l'investissement dans la technologie. Le milliardaire aurait déclaré qu'il est inutile de mettre en place des restrictions, car les besoins de l'IA finiront par les submerger.
Il a déclaré : « tout cela sera submergé par les besoins énormes de cette nouvelle technologie. Parce qu'il s'agit d'une technologie universelle, et parce qu'il s'agit de l'arrivée d'une intelligence extraterrestre... nous pouvons faire des erreurs quant à son utilisation, mais je peux vous assurer que nous n'y arriverons pas par la conservation ». D'après lui, il est plus sûr de répondre aux besoins pressants de l'IA que de chercher à préserver coûte que coûte le climat.
Les participants ont demandé à Eric Schmidt s'il est possible de répondre aux besoins énergétiques de l'IA sans négliger les objectifs de conservation. Eric Schmidt s'est montré clair dans sa réponse : « de toute façon, nous n'atteindrons pas les objectifs climatiques parce que nous ne sommes pas organisés pour le faire ».
Il a ajouté : « oui, les besoins dans ce domaine seront un problème, mais je préfère parier sur le fait que l'IA résoudra le problème plutôt que de la contraindre et d'avoir le problème ». Ses propos font écho à ceux de Bill Gates, qui a exprimé un avis très similaire lors d'un événement à Londres au début de l'année.
L'impact environnemental de l'appétit énergétique de l'IA soulève plusieurs préoccupations
L'impact environnemental des besoins énergétiques de l'IA soulève de nombreuses inquiétudes. L'avènement de l'IA générative a vu de plus en plus d'entreprises consacrer des ressources aux centres de données, qui consomment des gigawatts d'énergie. Cependant, Eric Schmidt, ne pense pas qu'il faille ralentir la construction de ces installations. L'Agence internationale de l'énergie (AIE) prévoit que la consommation d'énergie des centres de données d'IA en 2024 sera 10 fois plus élevée qu'en 2022. On estime qu'une seule requête ChatGPT consomme près de 10 fois plus d'énergie qu'une simple recherche Google.
Le PDG d'Arm, René Haas, a prévenu au début de cette année que les centres de données d'IA pourraient nécessiter jusqu'à 20 à 25 % de l'ensemble du réseau électrique des États-Unis d'ici à 2030. McKinsey estime que les centres de données devraient consommer 35 gigawatts d'énergie par an d'ici 2023, ce qui a un impact sur l'environnement. Il y a quatre ans, Microsoft a déclaré qu'elle ramènerait ses émissions de gaz à effet de serre à zéro d'ici à 2030.
Cependant, les derniers rapports de l'entreprise montrent que ces émissions ont connu une forte augmentation, ce qui, selon le président Brad Smith, est dû à l'explosion de l'IA. Le géant de Redmond n'est pas toutefois le seul à avoir constaté une hausse importante de ces émissions. Google a également admis que ses propres objectifs en matière de climat (notamment l'absence totale d'émissions d'ici à 2030) sont plus éloignés qu'il ne le souhaiterait.
Le rapport 2024 de Google sur le développement durable révèle une augmentation de 48 % des émissions totales de gaz à effet de serre entre 2019 et 2023. Jeff Dean, directeur scientifique de Google, a déclaré que l'IA n'est pas responsable de l'augmentation des émissions de Google. Mais le rapport indique que la majeure partie est liée à l'augmentation de la demande de traitement à partir de 2022, coïncidant avec de l'avènement de l'IA générative.
Grid Strategies a rapporté cet été que l'appétit énergétique de l'IA met à rude épreuve les réseaux électriques des États-Unis qui n'étaient pas préparés à une augmentation subite de la charge. Il estime que les prévisions de croissance sur neuf ans pour l'Amérique du Nord ont pratiquement doublé par rapport à 2023, car les entreprises construisent des centres de données pour l'IA qui font paraître minuscules les besoins des centres de données traditionnels.
Un récent rapport a signalé qu'OpenAI a proposé à la Maison Blanche de construire des centres de données de 5 gigawatts dans différents États américains pour répondre aux besoins élevés de l'IA. Mais l'impact environnemental d'une telle installation inquiète les experts. Pour donner un ordre d'idée, les cinq gigawatts équivalent à peu près à la production de cinq réacteurs nucléaires, soit suffisamment d'énergie pour alimenter près de 3 millions de foyers.
Les entreprises continuent d'investir des milliards dans l'IA malgré les résultats mitigés
De nombreux milliardaires, dont Eric Schmidt et Bill Gates, partent une vision plutôt optimiste du potentiel de l'IA à sauver la planète et à rendre la vie humaine plus facile. Cela peut peut-être s'expliquer par le fait qu'ils ont leurs propres investissements dans la technologie. Dans le cas d'Eric Schmidt, il serait le fondateur de White Stork, une entreprise de défense qui développe des drones dotés d'IA. Toutefois, des rapports parus cette année indiquent que l'IA n'est pas à la hauteur des milliards injectés et que les investissements commencent à se montrer de plus en plus sceptiques sur les promesses de l'IA.
Un rapport récent de Goldman Sachs indique que, malgré les quelque 1 000 milliards de dollars de dépenses en capital engagées par les entreprises pour développer et déployer l'IA, il n'y a eu que peu de résultats jusqu'à présent. Cela a entraîné une baisse de 6 % des actions Microsoft cet été. Une prédiction de Gartner prévoit qu'au moins 30 % des projets d'IA générative devraient être abandonnés après la validation du concept d'ici à la fin de 2025.
Malgré cela, les investisseurs continuent à injecter de l'argent dans l'infrastructure dont l'IA a besoin. En septembre 2024, l'entreprise de services financiers Morgan Stanley a estimé que l'industrie des centres de données devrait émettre 2,5 milliards de tonnes de gaz à effet de serre (GES) dans le monde d'ici à la fin de la décennie, soit trois fois plus que si l'IA générative n'avait pas été développée. Les experts mettent en garde contre les impacts négatifs.
Un autre rapport récent d'IDC indique que la demande de charges de travail d'IA entraînera une augmentation significative de la capacité des centres de données, de la consommation d'énergie et des émissions de carbone. Pourtant, Eric Schmidt semble croire qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter ou que le changement climatique se produira de toute façon et qu'il vaut mieux récolter les fruits de l'IA. En tout cas, ceux qui ont les moyens d'investir le feront.
Lors d'un événement organisé à Londres par son fonds de capital-risque Breakthrough Energy en juin 2024, Bill Gates a déclaré qu'il n'y avait pas lieu de s'inquiéter de la demande croissante d'énergie de l'IA, car celle-ci permettrait à chacun de consommer moins d'énergie en rendant la technologie et les réseaux électriques plus efficaces. L'on ignore pourquoi ces milliardaires ont autant foi dans le pouvoir de l'IA de résoudre tous nos problèmes.
Selon certains critiques, l'attitude adoptée par Bill Gates et Eric Schmidt n'est pas nouvelle. Elle consiste à ignorer les avertissements afin de réaliser des profits à court terme. « Elle existe depuis les années 70 et c'est exactement ce qui nous a conduits à la crise climatique actuelle », a écrit un critique.
Source : Eric Schmidt, ancien PDG de Google
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Pourquoi les milliardaires tels que Bill Gates et Eric Schmidt semblent minimiser l'impact environnemental de l'IA ?
Eric Schmidt affirme que l'IA aidera à résoudre les défis climatiques lorsqu'elle sera suffisamment mature. Qu'en pensez-vous ?
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