Des chefs d'entreprises technologiques poussent Trump à construire des « villes de la liberté » gérées par des entreprises
un mouvement libertaire tente de s'emparer des États-Unis avec l'aide de Trump
Une organisation appelée Freedom Cities Coalition tente de convaincre le président américain Donald Trump et le Congrès d'autoriser la création de « nouvelles zones de développement spécial » aux États-Unis. Il s'agit de « villes de la liberté » qui ne seraient pas soumises aux réglementations fédérales. Ainsi, les milliardaires de la Tech pourraient rédiger leurs propres lois et mettre en place leurs propres structures de gouvernance, contrôlées par les entreprises et n'impliquant pas la bureaucratie traditionnelle. Ces villes visent à servir de banc d'essai pour de nouvelles technologies bizarres, sans qu'il soit nécessaire d'exercer une surveillance gouvernementale.
Des « villes de la liberté » qui échapperaient à toute surveillance réglementaire
Donald Trump n'est pas un adepte de la réglementation, à l'instar de ses principaux soutiens issus du secteur technologique, dont les milliardaires Marc Andreessen et Elon Musk. De nombreux analystes craignent en effet que son retour à la Maison Blanche ne conduise à une déréglementation accrue du secteur de la technologie, ce qui aurait un impact préjudiciable sur les droits de l'homme. Toutefois, les choses pourraient aller encore plus loin.
Un récent rapport Wired révèle les coulisses des projets d'un groupe d'intérêt du secteur technologique appelé Freedom Cities Coalition. Il s'agit d'une coalition de groupes de la « Startup Nation » qui font pression en faveur de la création de « villes de la liberté » déréglementées. Des architectes de projets tels que Próspera rédige pour le Congrès une législation visant à créer des villes qui ne seraient pas soumises aux réglementations fédérales aux États-Unis.
Trey Goff, chef du personnel de la Startup Nation Próspera et membre de la Freedom Cities Coalition, a confié que l'association a rencontré l'administration Trump au sujet de l'idée au cours des dernières semaines. D'après lui, Donald Trump et son administration se sont montrés très réceptifs.
Le rapport indique que l'une des principales motivations des villes de la liberté est de permettre la mise en œuvre de nouvelles initiatives scientifiques et de développement technologique, telles que les essais cliniques anti-âge et le démarrage de réacteurs nucléaires, sans qu'il soit nécessaire d'exercer une surveillance réglementaire. Autrement dit, il ne serait nécessaire d'obtenir l'aval préalable d'agences fédérales comme la Food and Drug Administration (FDA).
En 2023, Donald Trump avait lancé l'idée de créer dix villes de la liberté aux États-Unis. Aujourd'hui, Trey Goff affirme que « la vision de Próspera et ses associés est non seulement de créer 10, mais autant que le marché peut le supporter ». Ils espèrent que le projet de loi sera prêt d'ici la fin de l'année.
Comment la Freedom Cities Coalition veut construire ses villes de la liberté
Selon Trey Goff, lors des discussions, la Freedom Cities Coalition a informé les responsables de la Maison Blanche de trois options pour parvenir à la création des villes de la liberté. La première consiste à conclure des « accords interétatiques » (interstate compacts). Dans ce scénario, deux États américains ou plus pourraient mettre de côté des territoires avec des politiques fiscales et réglementaires communes, avec des dérogations propres à chaque État.
En vertu de la législation en vigueur, ces accords ne peuvent pas être révoqués, mais ils peuvent être dissous dans certaines circonstances. Si un accord interétatique est approuvé par le Congrès, il devient valide en vertu de la loi fédérale. La coalition envisage une législation du Congrès qui donnerait un « consentement préalable » à tout accord entre villes pour la liberté. Ainsi, le Congrès n'aurait pas besoin d'approuver chaque ville individuellement.
Capture d'écran du site Web de Freedom Cities Coalition
Les deux autres options consistent à créer des enclaves fédérales avec des zones économiques et juridictionnelles spéciales, ou à demander à Donald Trump d'émettre des décrets pour créer chaque nouvelle ville de la liberté. « Cela dépend de ce que Trump et la Maison-Blanche veulent faire », explique Trey Goff.
« Quelle que soit la voie qu'ils souhaitent emprunter, nous voulons les aider à en faire une réalité », a-t-il ajouté. Sur son site Web, la Freedom Cities Coalition affirme qu'alors que « d'autres nations créent de nouveaux centres d'innovation, l'environnement réglementaire américain freine le progrès ».
Les pays en voie de développement s'appuient sur la création de zones économiques spéciales (ZES), où les règles habituelles régissant les entreprises ne sont pas appliquées, souvent dans le but d'attirer les investissements étrangers. L'espoir est, semble-t-il, d'introduire un modèle similaire aux États-Unis.Envoyé par Freedom Cities Coalition
Cependant, le projet de la Freedom Cities Coalition est largement controversé. Il est perçu notamment comme une initiative visant à protéger et à donner davantage de pouvoirs aux oligarques milliardaires de la Silicon Valley, tels que Mark Zuckerberg et Elon Musk, avec le soutien de Donald Trump.
Les impacts potentiels des villes de la liberté sur l'environnement et le climat
Où seront construites les nouvelles villes de la liberté des États-Unis ? Il semble que les partisans du projet envisagent de construire les villes de la liberté sur les ruines des parcs nationaux. Sur son site Web, la Freedom Cities Coalition note que « 28 % des terres américaines appartiennent au gouvernement fédéral et sont prêtes pour un développement innovant ». Elle ne précise pas quel type de terres fédérales est « prêt » pour cette « innovation ».
Toutefois, la plupart des domaines publics qui ne sont pas utilisés pour l'agriculture ou le développement énergétique le sont pour la conservation de la faune et de la flore. Pendant sa campagne, Donald Trump a ouvertement parlé de l'utilisation de terres fédérales protégées pour construire des « villes de la liberté ».
« Les générations précédentes d'Américains ont poursuivi de grands rêves et des projets audacieux qui semblaient autrefois impossibles. Ils ont traversé un continent instable et construit de nouvelles villes dans la frontière sauvage », a-t-il déclaré dans une vidéo diffusée pendant la campagne présidentielle.
Il a ensuite appelé à l'utilisation de terres fédérales protégées pour développer dix nouvelles métropoles urbaines. Selon Donald Trump, ces développements rouvriraient la frontière, raviveraient l'imagination américaine et donneraient à des centaines de milliers de jeunes et d'autres personnes une nouvelle chance d'accéder à la propriété et, en fait, au rêve américain. Toutefois, l'impact environnemental de ces projets suscite de nombreuses préoccupations.
La Freedom Cities Coalition n'est pas la seule à faire pression sur l'administration Trump. Frontier Foundation, un organisme à but non lucratif qui défend les libertés numériques, travaille en partenariat avec l'organisation à but non lucratif Charter Cities Institute pour introduire les villes de la liberté aux États-Unis.
Un projet similaire de villes de la liberté au Honduras a du plomb dans l'aile
La Freedom Cities Coalition est un projet de NeWay Capital, une société qui a joué un rôle central dans le développement de Próspera, une enclave privée, « libre de marché » et favorable aux cryptomonnaies au Honduras. La zone spéciale Próspera a été rendue possible par une réglementation spéciale, à l'instar d'une zone économique spéciale, qui a été établie dans le pays en 2013 à la suite d'un coup d'État soutenu à l'époque par les États-Unis.
Próspera fait partie de ce que l'on appelle le « Network State », un mouvement idéologique anarchocapitaliste, soutenu par des milliardaires de la Tech, qui cherche à créer des villes privées avec des cryptomonnaies natives. Mais Próspera n'a pas donné les résultats escomptés, avec des problèmes tels que :
- le manque de financement pour construire les infrastructures. Le plan initial prévoyait que le gouvernement subventionne la majeure partie du projet, mais même le gouvernement (à l'époque) favorable à la « ville de la liberté » a hésité lorsque les coûts estimés ont augmenté drastiquement. L'idée est devenue un énorme gâchis ;
- le gouvernement du Honduras s'est montré très réticent dès l'arrivée au pouvoir d'un nouveau parti. Car même avec de l'argent à profusion et tous les avantages, il faut des décennies pour construire des villes et le type de gouvernement qui approuve ces choses a tendance à ne pas rester au pouvoir pendant des décennies ;
- des rapports soulignent que personne, même une main-d'œuvre littéralement esclave, ne veut y vivre. Ils ont lancé l'idée de payer les gens pour qu'ils s'y installent, mais même cela n'a pas fonctionné ;
- de nombreux citoyens honduriens se sont opposés à Próspera, arguant qu'elle a augmenté la pauvreté et détérioré la biodiversité dans la région. En 2022, le Congrès hondurien a adopté une loi abrogeant l'autorisation des zones économiques spéciales, et Próspera a intenté un procès au gouvernement hondurien peu de temps après. Le procès est en cours ;
- l'objectif et la valeur ajoutée possible du projet ne sont pas clairs. L'absence de réglementation semble être une bonne chose en théorie, mais la construction d'une ville entière pour contourner les lois et les réglementations n'a pas réussi à démontrer qu'elle pouvait être rentable de manière réelle.
La Freedom Cities Coalition poursuit ses efforts visant à encourager Donald Trump et le Congrès à inscrire leur projet dans la loi fédérale. Actuellement, les lobbyistes poursuivent un certain nombre de stratégies différentes pour obtenir une sorte de loi autorisant le développement des villes de la liberté.
Les critiques expriment de sérieux doutes quant aux chances de réussite du projet. « On a toujours l'impression que Donald Trump adopte volontiers toute idée susceptible de brûler des milliards de dollars avec peu ou pas de contrôle. Je me demande pourquoi », peut-on lire dans les commentaires.
Source : Freedom Cities Coalition
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Selon vous, pourquoi les milliardaires de la Tech soutiennent-ils les projets de villes de la liberté ?
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